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Critique de migdal


L'expression « une vie de chien » est souvent employée quand on évoque le sort des poilus durant la Grande Guerre, et Alice Ferney lui fait écho dans ce roman bouleversant qui débute comme « Les Gardiennes » d'Ernest Pérochon, reprend la légende de Rintintin et se conclut comme « un long dimanche de fiançailles ».

Le 2 aout 1914, Jules Chabredoux, paysan landais, est mobilisé et rejoint le front vers l'est. Il laisse derrière lui son épouse Félicité, leur fils Antoine âgé de deux ans, sa mère Julia et son frère Louis trop jeune pour être appelé. Prince, le chien, garde la ferme familiale. Nous sommes loin, très loin de l'invasion, Julia, belle mère caricaturale et acariâtre, harcèle sa bru, et transforme progressivement ce havre de paix en enfer.

Jules subit le premier choc, particulièrement meurtrier, bat en retraite et participe à la victoire de la Marne avant de s'enterrer dans les tranchées où … Prince, son Colley le rejoint, est engagé par le Lieutenant Bourgeois et devient aide infirmier, patrouilleur, sentinelle et surtout le confident de toute la section. Adopté par Brêle, Joseph, et leurs compagnons, Prince court héroïquement d'exploit en exploit et finit par être décoré devant tout le régiment !

Débute 1917, la bataille de Verdun, fatale à Jules.
Puis le Chemin des Dames, les mutineries, les fusillés. Prince sauve Brêle qui rejoint les Landes, en route vers l'Espagne, et croise Félicité, Antoine et Marie née en avril 1915.
L'armistice en novembre 1918 ouvre une page blanche pour Félicité qui devra refaire sa vie et élever ses deux jeunes orphelins …

En quatre cent pages, compactes car l'auteur ne distingue pas les dialogues du texte, le lecteur participe aux combats et aux doutes de Jules et des hommes de son régiment, tout en vivant dans la ferme des Landes au milieu des femmes et des enfants. Contraste saisissant entre deux univers qui ont parfois du mal à se comprendre mais qui s'écrivent chaque jour ou presque. L'amour et l'incompréhension (nourrie par la presse qui cache la réalité brute à ceux de l'arrière), le deuil et la souffrance des familles apprenant au fil des jours les blessures, les morts, les disparitions sont magnifiquement décrites par Alice Ferney.

Mais son trait de génie, est d'incarner en Prince un observateur avisé qui analyse finement, plus finement que bien des humains, la réalité (particulièrement féroce pour les animaux) et contribue au moral des troupes et à la victoire finale.

Véritable ange gardien, ce quadrupède se révèle être un acteur essentiel et attachant de cet ouvrage original et passionnant qui rappelle que dans la guerre, et pas seulement, l'homme est souvent un loup pour l'homme.
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