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EAN : 9782742758142
481 pages
Actes Sud (28/10/2005)
4.19/5   332 notes
Résumé :
Jules avait refermé la porte derrière lui. Il était resté quelques secondes l'oreille collée au bois, écoutant le silence qui s'était fait dans sa chambre. Il n'entendait rien. Alors seulement il était parti, et la bête soumise, blessée par chaque pas du maître qui s'éloignait, s'était mise à souffrir. Qui a le pouvoir de retenir un soldat ? Pas même la souffrance d'un cœur. Et pas un enfant. Et pas l'amour d'une femme. Que dire de celui dont la détresse sans mots e... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (47) Voir plus Ajouter une critique
4,19

sur 332 notes
L'expression « une vie de chien » est souvent employée quand on évoque le sort des poilus durant la Grande Guerre, et Alice Ferney lui fait écho dans ce roman bouleversant qui débute comme « Les Gardiennes » d'Ernest Pérochon, reprend la légende de Rintintin et se conclut comme « un long dimanche de fiançailles ».

Le 2 aout 1914, Jules Chabredoux, paysan landais, est mobilisé et rejoint le front vers l'est. Il laisse derrière lui son épouse Félicité, leur fils Antoine âgé de deux ans, sa mère Julia et son frère Louis trop jeune pour être appelé. Prince, le chien, garde la ferme familiale. Nous sommes loin, très loin de l'invasion, Julia, belle mère caricaturale et acariâtre, harcèle sa bru, et transforme progressivement ce havre de paix en enfer.

Jules subit le premier choc, particulièrement meurtrier, bat en retraite et participe à la victoire de la Marne avant de s'enterrer dans les tranchées où … Prince, son Colley le rejoint, est engagé par le Lieutenant Bourgeois et devient aide infirmier, patrouilleur, sentinelle et surtout le confident de toute la section. Adopté par Brêle, Joseph, et leurs compagnons, Prince court héroïquement d'exploit en exploit et finit par être décoré devant tout le régiment !

Débute 1917, la bataille de Verdun, fatale à Jules.
Puis le Chemin des Dames, les mutineries, les fusillés. Prince sauve Brêle qui rejoint les Landes, en route vers l'Espagne, et croise Félicité, Antoine et Marie née en avril 1915.
L'armistice en novembre 1918 ouvre une page blanche pour Félicité qui devra refaire sa vie et élever ses deux jeunes orphelins …

En quatre cent pages, compactes car l'auteur ne distingue pas les dialogues du texte, le lecteur participe aux combats et aux doutes de Jules et des hommes de son régiment, tout en vivant dans la ferme des Landes au milieu des femmes et des enfants. Contraste saisissant entre deux univers qui ont parfois du mal à se comprendre mais qui s'écrivent chaque jour ou presque. L'amour et l'incompréhension (nourrie par la presse qui cache la réalité brute à ceux de l'arrière), le deuil et la souffrance des familles apprenant au fil des jours les blessures, les morts, les disparitions sont magnifiquement décrites par Alice Ferney.

Mais son trait de génie, est d'incarner en Prince un observateur avisé qui analyse finement, plus finement que bien des humains, la réalité (particulièrement féroce pour les animaux) et contribue au moral des troupes et à la victoire finale.

Véritable ange gardien, ce quadrupède se révèle être un acteur essentiel et attachant de cet ouvrage original et passionnant qui rappelle que dans la guerre, et pas seulement, l'homme est souvent un loup pour l'homme.
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La guerre c'est moche.
Et pis ça tue.
Et moi je dis que si chacun lisait ce roman terrible et magnifique, des guerres il n'y en aurait plus.

Qu'il s'agisse de sonder les consciences ou d'évoquer les mochetés contemporaines, la merveilleuse écriture d'Alice Ferney me transporte toujours.

"Dans la guerre" n'a pas dérogé à la règle, et pourtant l'effroyable quotidien des poilus de 14-18 et le sort douloureux de leurs proches consignés à l'arrière n'incitent pas forcément à la jovialité là tout de suite.

« Tout ce qu'ils avaient vécu ! L'oublieraient-ils jamais ? Quels hommes ces souvenirs sanglants forgeraient-ils ? Des brutes ou des sages ? »

Voilà de puissantes et mémorables pages, entre horreur, tendresse et compassion, pour illustrer ces questions et rêver que plus jamais on ait à les poser.


Lien : https://minimalyks.tumblr.com/
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Beaucoup de romans ont évoqué la première guerre mondiale. Mais j'ai trouvé ce livre original et émouvant: il présente deux points de vue, à travers la narration et les lettre échangées: celui de Jules, homme terrien fort attachant, parti sur le front de l'Est dès août 1914 et celui de Félicité, sa femme tant aimée, qui doit survivre, avec son petit garçon à la ferme, dans les Landes, en compagnie de sa sévère et dure belle-mère.

Alice Ferney écrit fort bien, et sait à merveille restituer l'ambiance de l'époque. Et surtout, elle nous fait pénétrer dans les pensées de ses personnages , avec un sens psychologique très sûr. Les douleurs des tranchées, l'attente des femmes à l'arrière, l'absurdité de la guerre, la fragilité des destins, tout est analysé profondément , avec justesse.

Et comme j'ai aimé le lien exceptionnel entre Jules et son chien Prince, qui plutôt que de se laisser mourir sans son maître, décide de le rejoindre sur le front, très loin de chez lui! Cela m'a fait penser au " Collier rouge" de Jean-Christophe Rufin.

Quelques longueurs néanmoins, mais cette lecture m'a donné beaucoup de plaisir et d'émotion: l'amour de Jules et Félicité, en dépit de tout, le rapport fusionnel entre un homme et un animal, les réflexions sur le manque, l'absence, la folie guerrière, voilà une oeuvre prenante, poignante, que l'on garde en mémoire. A découvrir, même si le livre n'est pas récent, peu de critiques, pourtant il mérite votre attention!
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Quel livre magnifique ! Un très, très gros coup de coeur !
Dès les premières pages, j'ai deviné que ma sensibilité ne résisterait pas à un tel récit.

Aout 1914, quand Jules quitte sa ferme et ses Landes natales, il ne sait pas encore que sa jeune épouse Félicité est enceinte de son deuxième enfant. C'est l'image de ce bonheur laissé derrière lui qui va être sa seule raison de survivre dans les tranchées de l'horreur. Aux côtés de son acariâtre belle-mère, Félicité commence la longue attente du retour. Seul Prince, le chien fidèle de Jules se refuse à cet abandon qu'il ne comprend pas et quelques semaines après le départ de son maitre, il part le rejoindre sur le front de l'Est.

Des romans sur ce thème, j'en ai lus pas mal mais peu écrits par des femmes. Et que dire de l'écriture d'Alice Ferney ? Simplement que c'est une pure merveille, chaque phrase est un poème même lorsqu'elle décrit les pires atrocités (si j'avais pu, j'aurais recopié tout le livre dans les citations). C'est cependant une lecture qui se mérite car le style de l'auteure est assez personnel. Le fait de noyer les dialogues dans le récit lui-même sans alinéas, ni guillemets, rend la lecture très dense. Ajoutez à cela l'avalanche d'émotions et vous comprendrez que les pauses sont nécessaires pour affronter l'indicible. Mais Alice Ferney ne nous parle pas que du pire, elle nous révèle aussi le meilleur comme les liens d'amitié indicibles qui se créent sur le front entre ses combattants venus de tous horizons. Quand à la belle relation entre l'homme et le chien, elle illumine simplement l'histoire. A travers le personnage de Prince, l'auteure rend hommage à tous les animaux enrôlés de force dans ce conflit qui n'était pas le leur.
En tant que femme, Alice Ferney se penche également sur le sort de celles-ci à l'arrière. Ses épouses et ses mères qui attendent le retour de l'être aimé, redoutant le passage du maire porteur de mauvaises nouvelles. Leur sort était-il plus enviable ?

L'auteure décrit admirablement l'évolution des sentiments et des hommes au cours du temps. L'engouement patriotique du début a du mal à résister à la prise de conscience de l'absurdité de cette guerre. Certains perdent la foi en un Dieu qui permet de tels massacres, d'autres la trouvent, le louant d'être encore en vie. Le mensonge reste le maître du jeu, celui d'un état pour son peuple, celui des décideurs derrière leur bureau pour les exécuteurs au cœur de la mitraille. Mais aussi ceux contenus dans les lettres adressées aux familles pour les épargner et ceux que l'on fait aux enfants pour les protéger d'une vérité inacceptable.

J'avais donné un 20/20 à "Grâce et dénuement" qui m'avait fait découvrir cette auteure et sa grande sensibilité. J'ai été tellement bouleversée par "Dans la guerre" que je ne peux pas mettre moins. Je suis étonnée que ce livre n'est pas eu plus de succès avec seulement 32 critiques au compteur. Je vous encourage à le découvrir. Quel talent ! J'ai hâte de découvrir d'autres ouvrages d'Alice Ferney.
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Kafka a écrit dans son journal : “Si la littérature ne nous réveille pas d'un coup de poing sur le crâne, à quoi bon lire ?”
C'est un coup de poing à l'estomac que j'ai reçu, de ceux qui mettent ensuite la lecture en jachère.

Ce sont de grandes pages sur la guerre, de celles qui n'existaient pas ou que je n'avais pas encore lues, des pages sur l'incongruité du destin d'hommes devenus soldats, morts ou vivants, sans rien avoir demandé.
Alice Ferney fait défiler la mobilisation, la bataille de la Marne, Verdun, le Chemin des Dames, les mutineries en les assortissant des absurdités du commandement.

Quelques pages sont consacrées aux chiens-soldats. Très utilisés par les Allemands (40 000), ils l'étaient peu par l'armée française alors qu'ils pouvaient être sentinelles, patrouilleurs, porteurs, télégraphistes, estafettes…
L'autrice offre à l'un deux, un Colley irlandais, un rôle central dans son roman.

L'écriture magnifie cette histoire, pourtant moult fois racontée, à laquelle Alice Ferney ajoute des suppléments d'âme.
Elle réussit le tour de force de nous dire – loin des témoignages qu'auraient validés Jean Norton Cru, dans son livre "Témoins" – une véracité de ce que vivent ses personnages.
Elle sait rendre les sentiments et pensées de ceux partis à la guerre, de la femme et de mère restées dans les Landes.

Lisez ce récit doucement au début pour en apprécier la fine narration des événements pourtant si effroyables.
Puis vous lirez la suite rapidement, impatients de vouloir savoir ce qu'il advient de chacun dans cette histoire dans l'Histoire.

Si il y avait un classement des livres montrant la monstruosité et l'absurdité de la guerre, “Dans la guerre” serait bien placé.

Vous voyez, j'ai accumulé les appréciations positives sans qu'aucune me paraisse assez forte pour constituer une punchline, mais je fais confiance à votre lecture pour vous mettre KO comme moi !



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Citations et extraits (87) Voir plus Ajouter une citation
Joseph Joffre avait gagné ses galons jusqu'à devenir chef d'état-major général en 1911, puis commandant en chef de toutes les armées en ce inois d août 1914. Il avait alors soixante-deux ans, une chevelure coupée court tout à fait blanche, une forte bedaine qui faisait plisser la veste de son uniforme autour des trois derniers boutons. Pour figurer sur les clichés, souriant au milieu des généraux, il portait son képi très enfoncé sur les yeux et se tenait bien planté sur ses jambes un peu écartées. Il n'arborait pas toujours ses décorations. Des jambières de cuir couvraient le haut de ses souliers lacés, et une paire de jumelles pendues au cou reposait sur la saillie de son ventre. Une épaisse moustache, blanche elle aussi, incurvée entre le dessous du nez et les lèvres, imprimait à son visage un mouvement descendant. Sans vouloir abuser des analogies animalières, l'expression de ses traits faisait songer à celle des morses. De ces mammifères marins, il avait aussi la composante exotique : c'était au Tonkin, au Soudan, et à Madagascar, qu'il s'était distingué. Autrement dit : il n’avait jamais mené une guerre sur son propre territoire.
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...le soldat Brêle avait raison : l'armée allemande disposait de tireurs d'élite équipés de jumelles, elle avait aussi des obusiers lourds capables de tirer à des kilomètres hors de la portée de notre propre artillerie. Les fantassins n'avaient qu'à en faire les frais, pensait le jeune homme, qui tâchait d'oublier les militaires vantards sans imagination de l'Ecole polytechnique. Il arrive qu’avec retard la vie donne raison à vos avis, mais il est trop cruel aux témoins de le faire remarquer.

Pour gagner la guerre contre les Boches, ironisait parfois Jean Bourgeois, il suffirait de créer Polytechnique en AIlemagne ! C'était un propos que l'on prêterait plus tard à Clemenceau, mais à ce moment l'idée pouvait mourir avec le jeune lieutenant.
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Chacun était rendu à lui-même, à la solitude absolue de sa vie qui n'appartient qu'à lui. Chacun se trouvait seul enfermé dans sa peau vulnérable. La blessure d'un autre n'était jamais la vôtre, qui ne serait pas celle d'un autre. S'ils en partageaient la perspective, ils ne prendraient part qu'à leur propre mort.
Le régiment de Jules avait fait de longues marches, Prince les refaisait à son tour... Des traces invisibles lui marquaient le chemin, mille empreintes et effluves essaimés pour lui, ce texte que gravent les odeurs, et qui s'offre aux bêtes minutieuses, peut-être comme récompense de leur silence, ou bien de leur fidélité.
Combattre n'était donc pas un jeu ! Les engagés volontaires, les revanchards, ceux que l'enthousiasme patriotique rendait belliqueux alors qu'ils étaient tendres, tous devenaient maintenant capables de se l'avouer vraiment. On les avait embobinés dans un fil de mots ! L'aventure guerrière n'était pas bravoure et décorations. On pouvait s'y trouver perdu et angoissé.
Pour la première fois de sa vie, Jules déplora que son chien ne parlât pas le langage des hommes... Privé de mots ! Quel sort était-ce? Une grâce ou une malédiction?
Qui d'autre, ayant reçu le langage en cadeau, avait toujours à la fin choisi les armes plutôt que les mots?
On croit tuer des types qui veulent nous tuer et méritent de mourir. Mais, dit-il, ne pouvant s'empêcher de poursuivre vers ce qui le faisait souffrir, moi je sais qu'ils sont comme nous les Boches : ils voudraient être chez eux. Un silence se fit. Cette symétrie de soi et de l'ennemi troublait.
Un enfant qui naît ouvre une fenêtre dans le coeur de sa mère, par où, tant qu'il vit coule l'amour qu'elle a pour lui, et par où s'enfuit la vie qu'elle perd quand il meurt, disait Julia après la naissance de Jules.
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Beaucoup de très jeunes soldats n'avaient encore, avant la guerre, jamais vu un mort de près. Et voilà qu'ils en découvraient des centaines ! Joseph était un autre. Déjà s'étaient détruits en un coup de fusil sa candeur et son élan. Maintenant il se rappelait le visage grave de sa mère lorsqu'elle revenait de faire une toilette mortuaire. Comme il admirait alors les femmes, capables d'affronter ce mystère caché, ce silence, cette fausse immobilité d'un corps en transformation, dans l'odeur douceâtre dont elles murmuraient à voix basse qu'elle monte si vite que c'est à peine croyable, et qu'elles voulaient qualifier, peut-être pour s'en défaire. Jamais il n'avait osé accompagner sa mère, et même lorsque le père était mort, il n'avait pas voulu le voir. Cette chair abandonnée, livrée aux bêtes minuscules, quel effroi ! Aujourd'hui il identifiait une dizaine de corps, les dépuoillait de leur uniforme et les transportait jusqu'à leur dernière place. Et Joseph avait changé d'idée. Ces cadavres n'étaient pas habités comme il l'avait cru, ils avaient encore leur nom et leur histoire, leur blessure les racontait et les faisiat revivre. Joseph devenait capable d'imaginer leurs derniers instants. Sous le sang collé et la plaie de leur blessure, il reconnut Tilleul et Chabat qui se moquaient vilainement de lui. Il éprouvait une tendresse pour eux. Des hommes qui vous étaient détestables debout dans leur vie devenaient attendrissants couchés dans leur mort. C'était un miracle de la guerre de faire éclore cette compassion dans le temps de la haine, cette certitude que nous sommes proches les uns des autres parce que promis au même sort silencieux. Les rescapés nommaient chaque défunt, et priaient pour lui avant de l'allonger dans la fosse. Les soins qu'ils apportaient à ceux que la guerre avait tués, s'il advenait qu'ils ne pussent plus les prodiguer, seraient-ils encore des hommes ? Ils seraient moins que des chiens, pensait Artéguy, des vautours, des hyènes...
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Nous avons créé un nouveau héros, dit Jean Bourgeois ce soir-là à toute sa section, un guerrier pacifique et silencieux, efficace et bienfaisant.

Un héros inhumain ! ironisa Brêle pour lui-même. Et Jules songeait que l'on ne pouvait mieux dire.

Qui avait plus que l’homme déçu les attentes dont il était l'objet ?

Qui d'autre, ayant reçu le langage en cadeau, avait toujours à la fin choisi les armes plutôt que les mots ?
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Vidéo de Alice Ferney
Découvrez l'émission intégrale ici : https://www.web-tv-culture.com/emission/alice-ferney-deux-innocents-53711.html Depuis son premier roman en 1993, « le ventre des fées », Alice Ferney s'est discrètement mais résolument installé dans l'univers littéraire français. Depuis, chacun de ses titres est attendu par un lectorat fidèle qui apprécie à la fois les sujets qu'elle traite mais aussi la qualité de son écriture, classique, allant à l'essentiel, sans artifice et néanmoins sensible et pudique, chargée d'émotion.
La maternité, la place de la femme, la famille, l'engagement, le sentiment amoureux et ses déchirements font partie des thème de prédilection de l'auteur qui signe aussi quelques chroniques dans Le Figaro littéraire.
Avec ce 13ème titre, « Deux innocents », publié chez Actes Sud, maison à laquelle Alice Ferney est fidèle, l'auteure nous emmène en septembre 2018. C'est jour de rentrée des classes, à l'Embellie, un établissement scolaire spécialisé qui accueille des enfants en difficulté, notamment des jeunes atteint d'un handicap mental mais dont on sait aussi que le coeur est deux fois plus gros et la sensibilité est exacerbée.
Et voici Gabriel Noblet, il a 16 ans. Il est nouveau dans l'établissement. Il va intégrer la classe de Claire Bodin, qui donne des cours de bureautique à ses jeunes à qui il faut bien dessiner un avenir.
Claire Bodin est la bonté même. Mère et épouse accomplie, le sourire aux lèvres, elle cherche à faire le bien. C'est ce qu'on lui recommande chaque dimanche, à l'église où elle est assidue. Claire ne cherche pas la lumière mais si elle peut apporter du réconfort, elle est heureuse. Et face au jeune Gabriel, en manque d'attention et de repère dans cette nouvelle école, Claire va faire ce qu'elle croit être utile. Lui donner de l'affection, de la tendresse. Oui, elle va le prendre dans ses bras, oui elle va lui donner son numéro de téléphone et répondre à ses messages. Quel mal y a-t-il ? Ces enfants ont tellement besoin d'affection… Oui mais voilà, jusqu'où est-elle allée ? Et l'ensaignante qu'elle est n'a-t-elle pas été trop loin ? Bien vite, la mère du jeune Gabriel s'invente une histoire, l'histoire se transforme en rumeur, la rumeur en vague, la vague en procès. La fatalité, l'inconséquence, le malentendu deviennent un crime. Claire est alors face à la justice. Sa vie s'écroule, les failles s'entrouvrent.
Choisissant une écriture résolument clinique, froide, insistant sur les dates, les lieux, les moindres détails, Alice Ferney nous raconte cette histoire, inspiré d'un fait authentique, comme une enquête, sans pathos, de façon très factuelle. Ainsi, chaque lecteur vit l'intrigue avec son propre regard, analyse lui-même les personnages, se forge sa propre opinion, tel un juré d'assise. Et c'est glaçant.
Par les sujets qu'il traite, par la fragilité des protagonistes, embarqués dans une histoire qui les dépasse, ce roman touche au coeur, interpelle, émeut et nous redit une fois encore combien Alice Ferney est une grande romancière, combien elle sait manier les mots pour aller au coeur de son histoire.
Ce livre est un coup de coeur
« Les innocents » d'Alice Ferney est publié chez Actes Sud.
+ Lire la suite
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