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Critique de Bouteyalamer


L'intrigue est en Corse et raconte quatre couples : Stéphane et Virginie, unis par un amour schizophrène, unilatéral, inaccompli ; Dominique et Vincent qui se disent autonomistes comme Stéphane ; Théodore et son fantôme ; Khaled et Hayet, frère et soeur immigrés. le livre raconte la dérive violente des autonomistes de 1985 à 2000. Stéphane, Dominique et Khaled seront assassinés. Théodore et Vincent survivent avec leurs doutes et leurs faux souvenirs : Je savais qu'il ne fallait pas fuir. Je savais qu'il ne fallait pas être ce que je suis. Mais la connaissance ne m'a servi à rien. Je n'en ai pas été digne (p. 152). le thème central est la lente formation du couple monstrueux de Stéphane et Virginie : le livre s'ouvre sur l'assassinat de Stéphane et se ferme sur les instants qui le précèdent. On n'arrive pas à plaindre Virginie de son aveuglement parce qu'elle donne gloire à son homme pour sa délectation dans ses crimes. Restent les femmes qu'on retrouve dans le même bar du Sermon sur la chute de Rome : Hayet, icône discrète de la dignité, et Marie-Angèle, la mère de Virginie.

Le thème profond est la perte de la vérité et du courage : les médiocres se reconnaissent dans l'image clinquante d'une résistance sans justification politique. Ici l'hubris n'est pas téméraire comme dans l'antiquité, elle est lâche et absurde : […] tout le monde les vit brandir fièrement leurs menottes scintillantes dans la lumière du soleil, comme des bracelets de roi, des bracelets d'or pur. Les caméras exposaient aux yeux d'une population fascinée depuis toujours par ses propres échecs et par toutes les formes de martyre de magnifiques vaincus, des hommes pleins de courage et d'abnégation, sacrifiant leur liberté à un idéal de justice dont personne ne doutait qu'il était supérieur aux lois (p. 50). Ces hommes imbéciles se croient investis d'une toute-puissance divine le jour où ils tiennent une arme.

Le livre est court, comme tous ceux de Ferrari, mais il est difficile à lire du fait de l'alternance de cinq chapitres nostalgiques, qui donnent leur nom au livre et portent le même titre « Derrière vous, la mer… », et six chapitres d'action, datés dans un ordre non chronologique, dont le premier et le dernier portent la même date d'octobre 2000. La phrase est magnifique, portant fièrement la contradiction de la pensée, de la parole et de l'action: […] Marie-Angèle, qui aimait sa fille beaucoup plus fort qu'elle n'avait jamais été capable de haïr quiconque, raffermit son étreinte en détournant son regard de la socquette tachée de boue et de sang et lui dit, oui, tu en mourras, je sais bien, et Virginie sanglota de gratitude […].
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