Citations sur Au nom du père (21)
Je suis comme ça: les enfants, les vieillards et les bébés animaux m'attendrissent au-delà du raisonnable. Un attendrissement toujours teinté de déprime car il y a dans la fragilité des uns et des autres comme une métaphore de notre universelle mortalité. A peine nés et déjà mourants, grignotés jour après jour, diminués sans pitié comme le sable du sablier.
Pour ceux auxquels ça aurait échappé, je ne suis pas le prototype du mec joyeux et légèrement insouciant. Même pas un brouillon raté. Plutôt son antithèse, en fait. (p. 32)
-Les pauvres ont toujours besoin d'un plus pauvre qu'eux, m'avait-il expliqué. Tous ces traîne-misère venus en Algérie parce qu'ils crevaient de faim dans leur pays d'origine, Espagne ou Italie pour l'essentiel, ont trouvé une forme de promotion sociale dans le fait que les Arabes étaient moins bien lotis qu'eux. Comme les petits Blancs de Louisiane avaient besoin de la misère des Noirs pour exister, le petit peuple pied-noir avait besoin de la colonisation pour affirmer une supériorité imaginaire. (p.114)
Si on la compare aux standards ordinaires, on peut dire que je mène une vie bizarre, pleine de bruit, de fureur et de violence. Une vie peuplée d'aventuriers au grand coeur, de méchants, de victimes et de salauds. Une vie dans les coulisses de la société , dans ses arrière-cuisines, et ce que j'y découvre n'est que rarement de nature à me réconcilier avec l'être humain. (p. 51)
On se serait cru à l’inauguration de la tour de Babel après que les invités se sont rendus compte qu’il n’y aurait pas assez de petits fours et qu’en plus les serveurs causaient en araméen.
La déco luxueuse et ostentatoire proclamait à la fois la fortune et l’absence de sens esthétique du propriétaire des lieux, dont les choix décoratifs correspondaient à la version friquée du coucher de soleil en canevas. Le moindre bouton de porte, le plus infime bibelot vous agressait l’œil et beuglait : j’ai du pognon, un goût de chiotte, et je vous emmerde.
Le père ! Cette ombre envahissante, écrasante, toute puissante, qui se projette sur la vie tout entière de chacun d'entre nous. Cette statue supposée parfaite et dont on ne peut que deviner, avec fascination et horreur les multiples imperfections. Cet inconnu qui nous tenait la main et auprès de qui on se sentait aussi fier, aussi protégé, aussi insignifiant. Cet objet d'amour dont on se sait rien ou si peu de choses et à qui, le plus souvent, surtout quand on appartient, comme moi, à cette foutue culture méditerranéenne, on n'a jamais pu dire les seuls mots qui comptent, les mots qui auraient tout réglé, tout effacé, tout expliqué: je t'aime. (p. 182)
Chez moi, la fibre boy-scout est aussi développée que l’intelligence chez un membre du Rassemblement National.
La déco luxueuse et ostentatoire proclamait à la fois la fortune et l’absence de sens esthétique du propriétaire des lieux, dont les choix décoratifs correspondaient à la version friquée du coucher de soleil en canevas.(...)
Indépendamment de ces considérations, cela me paraissait plutôt rassurant puisque, si je me trouvais ici, c'était précisément pour soutirer du fric au taulier et non pour débattre de la conception bourgeoise du beau comme marqueur social dans la société post-industrielle. (p. 11)
Ce gars pouvait être désagréable dès l’aube, à froid, sans mise en route. Un vrai talent. Moi, il me faut au moins deux cafés pour commencer à me montrer odieux
Quand on y pense, c’est fou le temps qu’on perd, pour des motifs purement diplomatiques, à manifester à des connards patentés des attentions et des égards que l’on n’accorde pas toujours à ceux qu’on aime ou qu’on estime.
Ce qu’on peut être con, parfois.
Souvent, même.
Toujours, à vrai dire.
Bref.