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Critique de karineln


« Comment ça meurt une ville ? »
A quoi on pourrait ajouter comment ça meurt un monde ?
Ambiance de fin du monde dans ce premier roman étonnant. On débute avec une famille ouvrière en proie avec la fermeture d'une usine, les conséquences désastreuses pour l'équilibre du foyer, la vie économique d'une ville, d'un pays, le chômage des enfants…Puis on continue avec une histoire d'amour à trois, une jalouse complicité entre deux frères, une femme envoûtante, libre, insaisissable…Et le drame, prévisible, survient : l'incendie d'une réacteur nucléaire à la centrale de Fessenheim.
Noël raconte à demi-mots, en suspends, en ellipses : un père mystérieux, des parents séparés, sa réserve encombrante, son regard sur son pays, sa ville et comment dans cet univers industriel, qui court à sa perte, il navigue ou flotte à vue sans réellement se projeter vers un avenir dont il ne nous dit aucun désir…En a-t-il seulement ?
« Il fallait pourtant vivre, et pour Félix et moi grandir, près d'un cadavre sans odeur, le squelette rouille et vert-de-gris de l'usine laissé là, pourrissant lentement au milieu de Belfort, comme un fantôme du passé ou un avant-goût de l'avenir. »
L'évacuation forcée de toute une région en alerte face au danger nucléaire déclenche un exil et une errance dans une atmosphère apocalyptique. Des inhumanités que les hommes n'ont de cesse de démontrer depuis toujours, et toujours les vilenies qui se multiplient quand la terreur et l'inconnu prennent le pouvoir.
En cela l'auteur ne nous apprend malheureusement rien. Cependant son roman est novateur en ne choisissant pas de décortiquer le périclite d'une usine, d'une société, d'un mode de vie mais en rédigeant la suite futuriste, proche, d'une transition à opérer qui ne semble pas pouvoir se réaliser sans destruction.
Ostwald plus qu'une ville porte le nom d'un âge, d'une époque, que semble incarner le père, lequel en disparaissant laisse peut-être la place à une nouvelle génération, qu'il inviterait dès lors à se réinventer loin, très loin des systèmes connus et répétés depuis ces dernières décennies, très loin du monde qu'il aura défendu et donc imposé à ses fils. Lui aussi s'évanouit dans la nature brumeuse, peut-être soulagé d'offrir une chance au nouveau à construire…
« Il y a quelques jours, assis sur le banc étroit d'un camion militaire, au milieu d'autres gens qui emportaient aussi peu de choses que lui, papa a dû se dire que dans tout ce chaos nous ne nous reverrions plus, que le temps était venu de nous laisser tranquilles. Et il était heureux, peut-être, alors que le tourbillon du monde l'emportait loin d'Ostwald. »
C'est sombre, réaliste, road-movie ouvrier sur une terre abandonnée. Les images sont belles pour décrire l'effondrement des institutions, des fondations comme des longs travellings nocturnes entre brouillards et feux incandescents…Premier roman comme une promesse.
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