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Critique de KrisPy


Adolf H., tout le monde connait cet homme, empereur de la terreur, kaiser de l'horreur.
Mais peu sont ceux qui connaissent les périodes de l'enfance et de l'adolescence qui précédèrent l'âge de déraison de cet odieux personnage.
Michel Folco, qui excelle à relater la vie des gens d'avant, et qui habituellement se délecte à nous conter les tribulations agitées de plusieurs générations d'une même famille - les Tricotin - nous invite cette fois à suivre ce jeune homme étrange et psycho-rigide.
Malgré tout, Folco ne dérogera pas à sa règle, les liens du sang ont parlé... les ramifications de la famille Tricotin ont encore frappées : le père d'Adolf n'est autre que le fils illégitime de Carolus Tricotin, Aloïs Hiedler ! (voir : Même le mal se fait bien.)
On va donc suivre depuis sa naissance, cet être étrange, qui deviendra ce que l'on sait...
Au début du récit, j'avais du mal à me défaire de l'ombre du monstre, un peu pesante, mais m'en suis vite délestée, car le réalisme et le style de Folco dédramatise la chose. Et la bête est encore à l'état larvaire, moins effrayante, voire pas du tout.
Elle est pathétique cette bête dans sa jeunesse. Elle est déjà toute étriquée cette personnalité, toute imbibée d'orgueil et d'envie. Les germes de sa folie sont bien là. Mais pas encore révélés.
Adolf est un jeune garçon qui n'aime pas son père, qui le corrigeait physiquement - chose somme toute assez banale à l'époque, ne cherchons donc pas là la naissance du mal.. Quand son père meurt, Adolf est content. Il sera tranquille pour manipuler sa mère. de fait, il fait ce qu'il veut, et part à Vienne pour s'inscrire aux Beaux-Arts. Mais le talent lui fait défaut, quoiqu'il en pense, car Adi a une très haute opinion de lui-même.
[Vous avez vu, je l'appelle Adi... oui, ce jeune garçon nous devient familier au cours de cette lecture... et cela produit un effet bizarre sur le lecteur, une espèce de schizophrénie contrôlée : on sait qu'il est question du pire dictateur de tous les temps, mais il n'a encore commis aucun crime, si ce n'est celui de n'avoir aucun goût en matière d'art, et il est si misérable et pathétique, qu'à un certain moment, j'ai même entendu les premières notes de Macadam Cowboy... Je n'irais pas jusqu'à dire que j'ai ressenti de la peine pour lui (oh non) mais j'ai eu de l'empathie, et me suis demandée si ce type, né à une autre époque, serait devenu ce qu'il est devenu...]
Alors il se verra contraint de vendre ses méchantes aquarelles à des encadreurs pour quelques pièces. Il vivra dans la pauvreté, solitaire, déjà enfermé dans son carcan de certitudes erronées, mais bizarrement, son antisémitisme n'est pas aussi développé que l'on aurait pu le croire, au regard de l'ambiance populaire de l'époque. (Rappelons qu'à cette période, c'est toute l'Europe qui est antisémite... L'affaire Dreyfus nous le rappelle.) Il semble qu'Hitler s'est servi du "prétexte antisémite" pour fédérer, mais ceci est une autre histoire. Il apparait également qu'il avait déjà cette propension aux monologues interminables et virulents. Un de ces colocataire, un jeune juif qui vendait ses toiles pour lui, se verra contraint de fuir dans une autre pension pour ne plus subir ses logorrhées incessantes sur Wagner...
Michel Folco réussit un bel essai, un angle d'approche très subtil, très drôle aussi, d'un humour grinçant, à lire entre les lignes, sur un sujet ô combien délicat et troublant.
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