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Critique de marc_tlse


Je connaissais déjà un peu l'affaire du médiator mais cette BD m'a attiré car elle reprenait l'ensemble de l'affaire et que Irène Frachon, fidèle à elle-même, reversait ses droits à l'association qui édite la revue Prescrire, la seule indépendante des publicités des labos.
J'ai tout de même découvert beaucoup de choses que les articles que j'avais lus ou le film »la fille de Brest » ne précisaient pas. Cette BD m'a permis de voir le sujet un peu plus largement (avec de nombreuses références citées) et çà me semble aller très au-delà du « crime en col blanc » décrit en 4° de couverture.

Il y a bien sûr l'attitude du laboratoire Servier (et de son patron, figure indissociable) qui préfère vendre son médicament plutôt que d'admettre ses effets dangereux et qui n'hésite pas à utiliser tous les moyens de pression. A l'autre bout, il y a bien sûr les victimes qui pensaient prendre un médicament inoffensif réglant juste un problème de surpoids pour beaucoup d'entre elles (souvent doublement manipulée par Servier pour le médicament et par tous ceux qui propagent des canons de beauté voire de santé poussant à la maigreur).
Mais beaucoup d'autres choses me semblent gênantes, à commencer par la faiblesse de peines prononcées pour les gens qui savaient ce qui se passaient. Bien sûr il ne faut pas généraliser mais on finit par se poser des questions sur à qui peut-on faire confiance : pas les labos, pas l'agence du médicament (à laquelle on peut au moins reprocher sa lenteur et sa prudence plus forte vis-à-vis des risques économiques et juridiques que de santé), pas les journalistes (les premières décisions n'ont pas vraiment été médiatisées et pourtant l'information des utilisateurs était essentielle), pas les politiques (avec l'exception notable du député Gérard Bapt … hommage à mon député-maire de l'époque), pas les chercheurs (dont certains ont préféré témoigner favorablement au Mediator pour garder les financements de Servier) mais surtout … pas les pharmaciens et les médecins ….

Car il ne s'agit pas d'un médicament vendu en grande surface … il fallait une ordonnance et passer par une pharmacie … il fallait un médecin qui détourne un médicament de son objectif et un pharmacien qui le délivre … bien sûr, on dira qu'ils ont été trompés par Servier … mais combien de médecins prescripteurs parties civiles dans le procès ? et surtout que faisait le conseil de l'ordre des médecins dans cette affaire … dans ce livre il n'est cité qu'en tant que menace de sanction du Dr Frachon … Pourtant sa mission est de «défendre l'indépendance et l'honneur de la profession médicale auprès de l'ensemble de la société française » (site de l'ordre). « le respect de l'éthique et de la déontologie médicale est l'un des principaux champs de compétence de l'Ordre des médecins. » (idem), « rôle de veiller au maintien de la compétence et de la probité du corps médical » (idem)…et je passe sur l'appui aux médecins en difficulté notamment sur le plan juridique dont je doute que le Dr Frachon ait pu bénéficier … Alors bien sûr le conseil de l'ordre est intervenu après coup auprès des médecins pour identifier les patients qui en avaient consommé en rappelant dans son courrier à chaque médecin que « le collège d'experts a décidé d'écarter la responsabilité des médecins quand bien même ils auraient prescrit le médicament hors AMM » tant il devait craindre que certains préfèrent cacher que certains de leurs patients en avaient consommé quitte à les mettre en danger. Mais n'avait-il pas un rôle en amont ? A minima en favorisant la lecture de la revue indépendante « Prescrire » (abonnement = coût de la cotisation à l'ordre) ou peut-être en sanctionnant les médecins qui ont soutenus les thèses de Servier (des professeurs en santé publique qui enseignent donc aux étudiants….) … mais il est vrai que déjà par le passé le conseil de l'ordre a permis à un chirurgien condamné à 3 ans de prison pour des interventions chirurgicales injustifiées mais lucratives (Dr Rossignol) de continuer à exercer, infligeant juste un blâme…l'impunité relative dans la santé n'est pas réservée aux laboratoires.

Vous l'avez compris ce livre vous scandalise mais fait naître le doute sur de nombreuses entreprises, professions, institutions. La dernière page refermée, il faut retrouver un peu d'optimisme et se convaincre que nous sommes entourés de médecins et pharmaciens consciencieux, de journalistes sérieux, de chefs d'entreprises remarquables, de femmes et d'hommes politiques soucieux des citoyens, d'institutions efficaces, … Je suis sûr qu'il y en a puisque j'en ai rencontré plus que des infréquentables !
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