Citations sur La sexuation du monde : Réflexions sur l'émancipation (11)
En France, aujourd'hui, on compte plus de 90% de femmes dans le service à la personne. Il faut dès lors réfléchir sérieusement à ce que signifie l'escamotage, c'est au sens fort du terme, à savoir que pour universaliser le care, toute démonstration, à un moment ou un autre, procède de l'effacement de la dimension sexuée du service.
Les femmes sont ainsi des otages, à leur corps et à leur esprit défendant, car elles ne sont plus la mesure de la liberté d'une société, mais servent au contraire à mesurer l'impossibilité de quelque chose dans une société.
Enoncer en toute rigueur l’égalité, c’est bien ; il faut, après, faire face à ses opposants. Trois « noeuds » problématiques, qui seront développés dans les textes ci-après, méritent alors notre attention dans le monde d’aujourd’hui : celui de la prévalence argumentative entre critique de la domination masculine et affirmation de l’émancipation égalitaire ; celui du croisement des catégories, exclues ou dominées, entre contiguïté des situations et contradictions des luttes ; celui de la mesure politique de l’égalité des sexes et de la liberté des femmes, transversale géopolitiquement
L’égalité ne souffre pas de limite, et son affirmation, « l’égalité des sexes », doit assumer toutes les conséquences pratiques, c’est à dire sociales et politiques, qu’elle entraine
appartenir à l’histoire, c’est imaginer sa possible transformation, un demain différent d’aujourd’hui. C’est ainsi que ma seule ambition philosophique est de convaincre de l’historicité des sexes. Et la subversion, toute subversion en est la conséquence logique
La ritournelle c’est comme refrain, en pire. Il est en effet frappant de voir à quel point, les stratégies de domination, comme celles d’émancipation, se réfugient dans la répétition argumentative, idéologique… Reconnaître l’historicité, c’est avant tout lutter contre l’atemporalité, toujours supposée, du rapport des sexes.
L’universel n’est pas une essence, et il n’est pas non plus, comme d’aucun-e-s le pensent, une norme
Il ne s'agit pas de se demander "que penser", mais plutôt "comment penser" ? Comment penser l'égalité des sexes en échappant aux pièges de l'identité des sujets ou des normes de la domination ? Car le vrai problème est celui de l'historicité, face à la volonté répétée de mettre les sexes hors du temps politique.
A la méconnaissance de l'absence de symétrie s'ajoute l'exigence du neutre démocratique. Ne pas désigner la sexuation d'un problème social (par exemple en transformant, à la fin du XXème siècle, les "mères célibataires" en "familles monoparentales") relève d'une intention politique vertueuse: en finir avec la stigmatisation.
En fait, l'important est qu'en prenant le point de vue de la symétrie, on offre un outil de plus à la pensée de l'égalité: est-ce la même chose pour les hommes et pour les femmes ? Combien de femmes, ou combien d'hommes, sont concernés par la prostitution ou par le care ?
Si la finalité de la femme libre est de pouvoir crier sur les toits, alors c'est une vision politiquement un peu courte de sa liberté d'expression ...