AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de kielosa


Que Darya Polyakova soit pour sa belle-fille, l'avocate allemande Paula Matthes et la narratrice du récit, une véritable catastrophe ambulante se comprend très vite. Ces pauvres belles-mères sur qui existent un peu partout tellement de (mauvaises) blagues, cependant la mère de son mari Artiom est un cas presque pathologique. Elle ressemble, selon elle, à "un mélange entre le comte Dracula et Barbarella" et Paula a une profonde horreur, lorsqu'elle l'appelle gentiment "Poletchka". La belle-fille a gardé son nom de famille, parce qu'elle estime se nommer Paula Polyakova est peut-être "amusant mais pas sérieux" pour une avocate allemande ".

Les Polyakov se sont présentés au cabinet de Paula, lorsque pendant un déménagement un violoncelle a disparu. Pas n'importe lequel, mais un exemplaire fabriqué par Carlo Giuseppe Testore en 1691 et qui leur vient du grand maître Mstislav Rostropovitch (1927-2007). C'était un cadeau d'adieu du célèbre virtuose à sa jeune maîtresse Ludmila, la mère de Darya, lorsqu'en 1974, grâce à Brejnev, il dût quitter l'URSS. La valeur en est un montant proche de 7 chiffres. Ėtonnant que ce bel instrument ne soit pas allé à une des 2 filles de Rostropovitch Olga ou Yelena, mais il est vrai qu'il possédait encore 2 Stradivarius et un Guarneri. Tout est relatif, la "Lady Blunt", un Stradivarius de 1721 et, joué par Yehudi Menuhin, a été vendu par Sotheby's en 2011 pour 11 millions d'euros.

Comment cette affaire se présente devant la cour de justice ... je vous laisse découvrir comme une surprise plutôt marrante ...pour la lectrice et le lecteur, malheureusement pas pour notre avocate.

En dépit de cette déception, le cabinet de Paula acquiert de nouveaux clients russes, mais également des Ukrainiens, Géorgiens, Kazakhs, Tatares et Ouzbeks, ou comment elle le formule avec délicatesse : "les personnes les plus diverses peuplèrent mon cabinet".

Un petit exemple : le couple Micha et Lena Nazukin. Lui, gère 3 boîtes de nuit, genre bordel, au centre d'Hambourg, est une grosse brute qui se déplace en limousine de maquereau. Elle, une petite femme, maquillée et habillée avec classe et qui prépare un doctorat à l'université sur "L'Histoire de la philosophie russe non marxiste à partir des philosophies slavophiles et eurasiennes". Micha passe son temps libre dans son atelier où il fait de la peinture abstraite. S'ils ont éprouvé le besoin de s'adresser à une avocate... c'est parce qu'ils s'aiment trop !

Et à propos d'amour, vous serez particulièrement gâtés par l'histoire d'amour pas simple du tout entre notre avocate intrépide et son bel Artiom, qui a un faible pour des surprises. Vous avez droit, sous l'oeil vigilant de Darya, aux préparatifs de mariage, ainsi que du jour et de la cérémonie de mariage. En prime, il y a la différence entre le clan allemand et le clan russe à cette glorieuse occasion.

La lune de miel, qui, à la suite d'une initiative de Darya, se passera "en famille", est remise à une date ultérieure, par l'arrivée à l'improviste d'Alexeï, le grand-père d'Artiom qui s'installe dans leur appartement aux dimensions déjà fort réduites. En plus, le "dedouchka" (grand-père) a amené 4 énormes malles. Alexeï est un colosse sympa qui se lève chaque matin à l'heure peu chrétienne de 4h45 pour faire des exercices de gym bruyantes sur le balcon, à la consternation de Mme Hinrichs, voisine et propriétaire, après quoi il y a des airs d'opéra chantés à tue-tête sous la douche en inondant la salle de bain. Avec la voisine ça s'arrange relativement vite, parce qu'ils aiment regarder le soir ensemble à la télé une série romantique basée sur l'oeuvre de Rosamunde Pilcher, décédée en février dernier.

Les amis d'animaux ne sont pas oubliés pour autant, car Darya a 4 chiens : Wassia, un terre-neuve de plus de 80 kilos ; Spoutnik, un caniche français de race très pure ; Caruso, dont l'origine est moins évidente et Raspoutine, un teckel hargneux. Karl, le père de Paula, n'en a qu'un seul, Eika, un superbe braque de Weimar. Tellement superbe qu'un petit accident de rencontre a lieu entre Wassia et Eika, qui a failli en mourir, mais qui est sauvée, tout comme les 7 chiots, grâce à l'intervention du grand-père, qui a été chirurgien maxillo-facial de carrière dans la capitale ukrainienne.

L'humour et en même temps le charme de l'ouvrage réside dans le contraste entre le sérieux et la rigueur teutonique et l'approche fantaisiste et souvent surprenante slave. Alexandra Frölich, journaliste pour différents magazines en Allemagne et en Europe de l'Est, entre autres à Kiev où elle vient de lancer sa propre revue, est merveilleusement bien placé pour disséquer ce contraste. Et vu le succès de ce premier roman en Allemagne et ailleurs, elle a récidivé, puisqu'en juin 2020 paraîtra "Gestorben wird immer" que l'on pourrait traduire par 'on meurt toujours'. Un livre que je me suis déjà commandé, quoique ce soit l'histoire d'Agnes, une nonagénaire, qui en a un chouïa ras-le-bol de son entreprise des pompes funèbres !

Je trouve que l'auteure a fait honneur à son nom de famille : fröhlich en Français signifie joyeux, comme dans "fröhlich Weihnachten" ou joyeux Noël, par exemple.
Commenter  J’apprécie          536



Ont apprécié cette critique (52)voir plus




{* *}