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Critique de Alfaric


Les éditions Ki-oon, plus habitués aux shonens et aux shojos, nous offrent un seinen tellement ambitieux qu'on peut sans équivoque le qualifier de gekida moderne (et dans une superbe édition au format comics s'il vous plaît, intitulée collection Latitudes !)…
Mais après tout, le manga seinen est l'héritier des mangas dramaticos-sociaux des années 1960/1970 censurés par le Japon bien-pensant (vous savez, celui qui a répondu à Hiroshima par des unités antiémeutes, et qui répond à Fukushima par la censure et le réarmement : encore des zélites humainement incompétentes, qu'on vouera volontiers aux gémonies) !

Japon, 1968. La jeunesse désenchantée qui n'a connu que la pauvreté de la reconstruction post Seconde Guerre Mondiale accède enfin à la société de consommation… Mais tandis que certains mènent la belle vie, beaucoup de gens restent dans la galère ! C'est vous dire comment toutes les thématiques du conflit de génération propre à cette époque où la jeunesse représente un tiers de la société sont ici démultipliées… (Surtout qu'ici, c'est ceux qui ont été cause du malheur du peuple japonais qui s'en sortent le mieux ! Décidément les homines crevarices savent tourner les choses à leur unique profit… Qu'ils soient tous maudits !)


Le récit de ce tome 2 continue de se dérouler dans les coulisses d'une Histoire qui est esquissée plutôt que dessinée, avec des personnages historiques tellement fantasmés qu'on franchit la frontière de l'uchronie. Une belle histoire d'amitié sur fond de nihilisme car les horreurs du Japon Impérial et la misère du Japon d'après-guerre hante une génération perdue tentée par la destruction ou l'autodestruction à travers les suicides individuels ou collectif !
- dans un 1er temps on suit le récit de deux pères policiers en conflit avec leurs fils révolutionnaires… faute de pouvoir châtier leur progéniture, ils se vengent sur la progéniture d'autrui et ce faisant ne font que répéter leurs erreurs et accentuer la tragédie
- dans un deuxième temps les trajectoires individuelles s'entremêlent…
Yoko 2 quitte le mouvement pour rejoindre N alors que Yoko 1 quitte N pour rejoindre le mouvement malgré tout ce qu'il lui a fait subir, T suit les traces de N tandis que N suit les traces de T et le passé tragique du serial killer repenti resurgit…
Et tous se retrouvent pour l'assaut sur l'université de Tokyo, où Yoko 1 est entourée d'un étudiant marxiste prêt à tout pour elle et d'un cinéphile pervers prêt à tout pour se servir d'elle…
- dans un 3e temps, les 300 millions de yensreviennent dans le récit…
Yoko 1 bascule dans le nihilisme et veut les utiliser pour acquérir une Arme de Destruction Massive auprès de l'URSS
La team N remonte la filière pour empêcher Yoko 1 de parvenir à ses fins et enfin la ramener à la raison
La police remonte la filière pour que Yoko 1 parviennent à ses fin et ainsi décrédibiliser les 68tards

Epilogue plein d'amertume :



Un manga riche et dense tant sur le fond que sur la forme, superbement exécuté par le scénariste Eiji Otsuka ("MPD Psycho", "Kurosagi, livraison de cadavres"), qui remplace les expressions émotionnelles des personnages par des poèmes de l les haïkus de Takuboku Ishikawa, et le dessinateur Kamui Fujiwara ("Dragon Quest : Emblem of Roto") qui réalise un découpage impeccable inspiré du cinéma Nouvelle Vague, mais au ton très froid, dans le style des romans naturalistes d'Emile Zola, et qui nécessite une connaissance de l'histoire et de la culture de l'ère Showa pour pouvoir être apprécié à sa juste valeur. Donc si le résultat est impressionnant, je ne pourrais pas le recommander chaudement… Ah oui, sinon merde aux prescripteurs d'opinion parlant de personnages mous, d'intrigue creuse et d'une édition faiblarde... La vie est plus forte que leurs commentaires pisse-froid !


Challenge Pavés 2015-2016 2/2
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