Peu de femmes dans la vallée avaient eu l'occasion de voyager aussi loin, et ce qui pénétrait les sens dans la jeunesse résistait aux cicatrices des années.
Mais, pour elle, ce serait à jamais l'histoire de personnes dont le grand accomplissement aurait été de modifier l'histoire rigide et inamovible d'une maison de pierre centenaire, qui affrontait à présent son avenir avec la même détermination pleine d'espoir et tremblotante qu'un fragile papillon.
On ne peut pas transplanter un arbre au tronc si gros, ni une fleur déjà poussée. Elle mourrait. A moins de creuser profondément, leur répondrait-elle, de laisser les racines prendre le plus de terre possible et d'arroser en continu. De plus, ajouterait-elle, les racines d'une personne ne sont pas des objets physiques. Les racines se portent à l'intérieur. Ce sont des tentacules qui s'étendent le long de nos terminaisons nerveuses et qui nous maintienne entiers. Elles nous suivent où que nous allions.p430/431
La génération de Clarence disposait d’ordinateurs, de mails et de téléphones pour contacter sur-lechamp leurs proches. Il en résultait des êtres impatients, ne supportant ni l’incertitude ni l’attente, et le moindre retard dans la satisfaction de leurs désirs devenait une lente torture.
Tout ira bien, ment-elle. Elle ment parce qu’elle le sait, elle souffrira chaque fois qu’elle traversera la cour, entrera dans la salle à manger, posera la main sur la rampe blanche de l’élégant escalier. Elle souffrira chaque fois que l’on prononcera le nom du pays où tu pars. Chaque fois qu’elle entendra le moteur d’un avion.
Je ne pourrai ni te voir ni te toucher, mais où que tu sois tu feras partie de moi.
"La famille est comme une forêt, lui avait-il dit. Si tu es en dehors, tu ne vois que sa densité. Si tu es à l'intérieur, tu peux voir que chaque arbre à sa propre position."p430
Peu importe à quelle vitesse on va. Si on en croit un proverbe africain, tu peux te lever aussi tôt que tu veux, ton destin se sera levé avant toi.p430