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Critique de Pecosa


Pecosa
14 septembre 2020
Heureuse surprise: acheter pour la plage ce qui ressemble à du hard boiled d'après la photo assez convenue, commencer à lire et s'apercevoir au bout de deux pages que si l'habit ne fait pas le moine, la couverture ne fait pas le roman. On referme illico le livre et on file le lire chez soi, au calme, parce qu'on tient enfin un polar comme on n'en a pas lu depuis longtemps.
Carlos Lombardi (moitié Argentin, d'où le patronyme) est un ancien membre de la police criminelle resté fidèle à la République. Déchu de ses fonctions, il est envoyé comme prisonnier politique à Cuelgamuros pour travailler comme esclave à la construction du Valle de los Caídos. En cette fin d'année 1941, son ancien collègue Balbino Ulloa qui a pris du galon le fait momentanément libérer afin qu'il se charge d'une affaire délicate: enquêter sur la mort d'un prêtre. Car le crime présente des similitudes avec des affaires non résolues sur lesquelles Lombardi avait enquêté avant la guerre.

La plupart du temps, les intrigues de polar tiennent sur un ticket de métro et sont délayées dans du jus de chaussette. Ici Guillermo Galván (dont je n'avais jamais entendu parler) offre une trame complexe à souhait dans l'Espagne de la post guerre, période épouvantable s'il en est à part pour une poignée de thuriféraires.
Le dernier bon polar lu sur cette période (à part l'excellent Perros que duermen de Juan Madrid qui se déroulait sur deux époques) était El Arte de matar dragones de del Valle, avec un héros phalangiste. Ici Lombardi est un Républicain, -«  No soy un disidente: el Régimen es el disidente con la legalidad republicana. » - qui retrouve momentanément la liberté dans un Madrid ravagé par les épidémies (tuberculose, gale, teigne…), la famine, les arrestations et les exécutions. .
Car nous sommes en pleine « Période bleue » et ce n'est pas du Picasso.L'après-guerre est marquée par une violente répression, les prisons et les camps de concentration sont pleins, les fosses parsèment tout le territoire. En plus de cette politique de la terreur et la situation économique dramatique du pays, Guillermo Galván montre à travers de nombreux personnages secondaires (le diplomate Josef Hans Lazar , nommé par Goebbels, qui a la main mise sur le pays et la presse, Alfredo Kindelán Duany, Serrano Súñer el Cuñadísimo, le singulier prêtre Leocadio José Lobo..) de quelle manière l'Angleterre et l'Allemagne manoeuvrent pour orienter la politique de Franco pendant que la haute bourgeoisie, le clergé, les phalangistes, les monarchistes se disputent le pouvoir.

Enquête dans une ville morte, Tiempo de Siega (Le Temps de la Moisson), fait aussi la part belle aux personnages complexes: Lombardi l'anti-héros qui retrouve ses réflexes de policier, son adjointe Alicia Quirós, phalangiste convaincue reléguée aux tâches subalternes parce femme, Ignacio Mora, journaliste un peu trop fantaisiste pour l'époque et la fonction… Bref, Guillermo Galván m'a littéralement charmée, par son sens de l'intrigue, sa manière d'ancrer l'histoire dans une période peu traitée dans les romans policiers, par son art de parsemer faits et anecdotes sans plomber son roman. Et je me félicite d'avoir acheté en même temps que Tiempos de Siega la suite intitulée La Virgen de los Huesos, en espérant que cet auteur soit traduit et publié en France.
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