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Critique de paulotlet


Dans cet ouvrage de vulgarisation, Howard Gardner revient sur sa théorie des Intelligences Multiples, vingt ans après le début de ses recherches. Au départ de l'observation de patients atteints de pathologies lourdes, incluant des lésions de zones cérébrales entières, l'équipe de Gardner a été frappée par le fait que, souvent, les malades conservaient des compétences importantes dans certains domaines alors que d'autres leur étaient désormais étrangers. on pense aux idiots savants, aux autistes doués d'un prodigieux talents mathématiques, aux aphasiques par ailleurs parfaitement intelligents.
La théorie de Gardner postule qu'il existe plusieurs intelligences, contrôlées par des zones du cerveau bien définies et qui sont relativement indépendantes. L'intelligence logico-mathématique et l'intelligence langagière n'étant que, celles que les sociétés occidentales considèrent comme l'intelligence en soi. Il décrit des intelligences musicale, spatiale, interpersonnelle et intrapersonnelle et enfin une intelligence kinesthésique, l'intelligence du corps. Il propose aussi une intéressante explication du rapport entre capacités innées et socialement acquises, postulant que nous avons tous des dispositions dans les sept intelligences, certaines étant développées dès le plus jeunes âge, d'autres devant être travaillées et ce d'autant plus facilement que nous y sommes prédisposés. Cette position tranche avec les théories peu nuancées qui voient l'intelligence comme génétique et celles pour lesquelles il n'y à de talents que socialement acquis. C'est cette mise en question radicale de la conception innéiste qui a conduit Gardner à critiquer avec virulence les tests institutionnalisés comme le QI et à envisager les implications de sa théorie sur l'éducation.
Le QI est une invention française, elle date des toutes premières années du XXe siècle. Alfred Binet avait imaginé pour le compte de la ville de Paris un système permettant de mesurer l'intelligence des élèves et, partant, de prédire leurs résultats scolaires. L'idée de base était que le QI est une espèce de patrimoine immuable, présent dès la naissance et qui évoluera très peu. Tombée aux mains de dangereux pédagogues, la méthode a été utilisée pour orienter les élèves. Elle avait sans doute le mérite de rassurer la petite bourgeoisie; si les fils d'ouvriers réussissaient moins bien que ceux des médecins et des avocats, ce n'était au fond que le reflet du capital génétique transmis. Or, pour Gardner, le QI ne mesure que les compétences langagières et logico-mathématiques à un moment donné. Ce que beaucoup de psychologues identifient comme l'intelligence générale, immuable et attachée définitivement à un individu, qui dès lors ne progressera ni ne régressera pas de manière significative. On a détruit des générations de gamins avec ce genre d'idioties.
Gardner a, depuis 1983 et le début de ses travaux, énormément investit le champ de la pédagogie, cherchant à proposer des méthodes qui tiennent compte des dispositions personnelles des élèves et investissent dans une approche individualisée, tant pour permettre l'épanouissement des intelligences pour lesquelles l'élève à des facilités que pour développer les autres.
En lisant le bouquin de Gardner, j'ai été, une nouvelle fois, frappé de constater que les logiques à l'oeuvre dans l'enseignement visent plus à reproduire un modèle et des rapports sociaux qu'à permettre l'épanouissement de tous. Nos écoles écrasent les enfants. Les pédagogues semblent croire que l'excellence d'une société s'obtient en éliminant ceux qui n'ont pas les compétences langagières et logico-mathématiques qu'ils peuvent mesurer. Dans une société juste, l'excellence résulterait de l'agrégation des compétences des uns et des autres. Et on n'éjecterait plus Louis Armstrong de l'école.
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