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Critique de GenevieveSteinling


« Ouvrir les portes de la nuit ». C'est le titre du premier chapitre de ce livre qui se présente un peu comme le trajet initiatique d'un petit garçon jamais vraiment devenu adulte. L'enfant Jacques Prévert était triste quand le Jardin du Luxembourg fermait ses grilles le soir, comme si on lui avait fermé les portes de la joie de vivre. Mais, devenu grand, l'enfant ne cessera jamais de passer à travers les grilles, de préférer les chemins de traverse aux chemins tracés et imposés par la société. Ce livre n'est pas seulement une évocation du Paris de Prévert, des lieux qu'il a arpentés, où il a vécu. Danièle Gasiglia-Laster a choisi de nous raconter Prévert et Paris un peu comme un roman. S'inspirant d'un célèbre passage du poème « Barbara » : « …ne m'en veux pas si je te tutoie / Je dis tu à tous ceux que j'aime », elle s'adresse à son auteur à la deuxième personne du singulier et rêve qu'elle se promène avec lui en remontant le temps, parmi les feuilles mortes mais aussi parmi les fleurs à peine écloses. Cette promenade à travers la ville tant aimée par le poète est une sorte de rêve éveillé qui nous mène non seulement à Prévert mais nous transporte aussi dans ses collages et dans ses textes. Un des chapitres les plus oniriques est celui qui emprunte son titre à un poème d'Histoires : « Encore une fois sur le fleuve ». Danièle Gasiglia-Laster imagine qu'elle refait avec Prévert le parcours le long de la Seine proposé par lui dans ce poème ; mais alors que le récit se déroulait du lever du jour à la tombée de la nuit, cette promenade insolite a lieu de la tombée de la nuit au lever du jour. Prévert aimait beaucoup la nuit et les rencontres qu'on peut y faire. Nous entrons ainsi dans une de ses oeuvres tout en l'accompagnant dans une des déambulations nocturnes dont il avait l'habitude. Les êtres rencontrés sont les mêmes que ceux du poème mais pas seulement. Danièle Gasiglia-Laster fait aussi intervenir des personnages de films dont Prévert a écrit les dialogues et mêle astucieusement les mondes réel et imaginaire du poète qui a été aussi un prodigieux scénariste.
Cette originalité du récit, qui rend la lecture de ce livre particulièrement agréable, n'exclut pas le sérieux. L'auteure est une grande spécialiste de Prévert – elle a notamment publié avec son mari, Arnaud Laster, les oeuvres de l'écrivain dans la Bibliothèque de la Pléiade – et connaît bien son sujet. On apprend donc beaucoup de choses sur le poète et sur les événements qui ont contribué à forger son oeuvre, une des plus populaires du XXe siècle, tout en ayant l'impression de ne pas lire un texte didactique ou critique mais l'histoire d'un personnage généreux, marginal, inventif et rebelle. Ce parcours poétique et inspiré nous conduit jusqu'à une ouverture : celle des portes de la nuit sur le soleil.
Excellent livre que j'ai beaucoup apprécié.

Lien : https://genevieve-steinling...
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