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Critique de ma_dalton


Les dirigeants de la multinationale Goldtex viennent d'annoncer le rachat de la Grèce, et les citoyens d'Athènes pris de panique cherchent à fuir mais la ville est paralysée. Zem Sparak, le héros du livre, a un badge et un brassard qui lui permettent de passer les barrages et de quitter la ville. Nous découvrirons plus tard dans le livre les circonstances qui lui ont permis d'obtenir un tel privilège.
Trente ans plus tard, nous le retrouvons à Magnapole, une ville divisée en trois zones hiérarchisées et « verrouillées » la circulation entre zones étant contrôlée par les forces de l'ordre. Les conditions de vie varient fortement dans les différentes sections de la ville. Par exemple, seuls les citoyens de zones 1et 2 ont accès à un dôme climatique qui les met à l'abri des fortes pluies acides, des ourgans et de la chaleur torride. Zem Sparak détient le statut évocateur de « chien », c'est-à-dire de policier en zone 3, la plus défavorisée où il sera amené à enquêter sur des meurtres sordides en duo avec Salia Malberg , enquêtrice en zone 2 après avoir été « déverrouillés »tous les deux. En effet, les cadavres éventrés sont retrouvés dans une zone autre que celle à laquelle ils appartiennent.

À partir d'une situation pas si lointaine et hélas bien réelle , celle de la Grèce au bord du gouffre, nous voilà propulsés dans un avenir dystopique, glauque et déshumanisé dans une ambiance qui n'est pas sans rappeler le livre ou le film Blade Runner . Dans la magnopole de Chien 51, la technologie est aussi souveraine. Toutefois, cette technologie ne peut pas vraiment nous surprendre, elle devance seulement de quelques (petits) pas celle dont nous disposons aujourd'hui : les citoyens portent des Smart rain faits de textile intelligent, les réfrigérateurs sont connectés et se remplissent au fur et à mesure qu'ils se vident, Curasix, un petit appareil enregistre nos données médicales et nous informe en temps réel de l'état de nos artères, de notre pression sanguine ainsi que des gains et reculs de notre espérance de vie en fonction de nos actions, certains privilégiés bénéficient d'mplants d'Éternykos tandis que d'autres servent de cobayes aux expérimentations. Toutefois malgré toutes ces avancées, l'humain reste toujours égal à lui-même, mené par ses passions, avide de pouvoir et d'argent, et si fragile à la corruption. Mais l'ennui, la désillusion et la perte de sens gagnent du terrain chez les défavorisés. Les dirigeants l'ont bien compris et appliquent le fameux Panem et circenses, qui a garanti la cohésion de l'empire romain. Une fois par année un tombola permet à un heureux élu et sa famille d'être promu dans une autre zone. (n'y a -t-il pas aux États -Unis, une loterie qui permet aux demandeurs de résidence en attente d'obtenir une carte verte?) , une fois par an le LoveDay- sorte de bacchanales-apaise les corps. Et plus prosaïquement, au quotidien, pour aider les citoyens à continuer de fonctionner dans un monde uniquement axé sur la rentabilité, le système leur offre Okios, (cela ne ressemble-t-il pas à une de mes marques préférées de yogourt grec?) une drogue technologique qui leur permet de vivre leurs fantasmes en réalité virtuelle .Pour Zem, ce sera de retourner dans son paradis perdu, l'Athènes qui l'a connu homme libre.

A travers Chien 51, à la fois polar et roman d'anticipation, Laurent Gaudé nous présente dans un miroir grossissant les dérives de notre société néolibérale actuelle et nous invite peut-être à nous désintoxiquer pour retrouver notre humanité et un sens plus profond à la vie.
Un tantinet effrayant mais décapant!
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