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Citations sur Le livre des incompris (5)

Extrait 1 : Éros sonore


C/

Nous nous sommes revus chez elle, dans son appartement rempli de livres. On eût dit qu’elle tenait à avoir, où qu’elle se trouvât, un livre à portée de main. Il y en avait partout. Même tout gondolés, au bord de la baignoire dans la salle de bains. Des livres et des plantes aussi, parfois fort bizarres, certaines paraissant des algues marines un peu raffermies par un séjour hors de l’eau, d’autres les cheveux verts de fées tombant le long des meubles. La plus grande, aux larges feuilles, déployait d’éclatantes coroles rouges où pointait un pistil qu’on devinait sensitif. Il régnait là un désordre rangé, comme si quelqu’un avait fébrilement cherché ici quelque objet, sans pour autant rien déplacer. Un désordre subtil comme dans un décor de film, et pourtant naturel. Un désordre où, en faisant l’amour, nous pourrions soudain sentir sous nos corps un livre oublié entre les draps du lit ou les coussins du canapé, en lire le titre en riant avant de le jeter de côté et de le laisser là, parfois des jours durant, sans songer à le ramasser. Un désordre, en somme, érotique.
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Extrait 2 : Index librorum prohibotorum


B/

Le libraire se lève, boitille jusqu’à Matías Vázquez de Tormes, se présente à mi-voix : il est Bartolomé Borja, imprimeur-libraire, et tient sa librairie à la disposition du Saint-Office pour l’inspection. Il attend que l’inquisiteur soulève la peau de chamois, le questionne sur ce qu’il écrivait, l’emprisonne peut-être. Mais l’inquisiteur ne bouge pas, ne demande rien. Il est pensif ; il observe Bartolomé Borja avec attention. Le libraire n’a pas, ici, ce regard fou que Matías lui a vu si souvent devant le feu ; ses yeux sont vides plutôt, n’exprimant rien, sauf peut-être un fond de peur assez bien maîtrisée. Bartolomé, lui, pense à la peau de chamois, aux feuillets qu’il y a sous elle, à ce qu’il y a, écrit, sur ces feuillets. Il pense aux geôles où n’entre aucune lumière ; il pense à la Question et ses ustensiles atroces ; il pense, soudain, au bûcher, et un frisson d’horreur mêlée d’une douceur étrange monte au long de son dos.
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Extrait 1 : Éros sonore


A/

Je me souviens d’un matin d’hiver où je m’éveillai dans un état étrange. Quelque chose avait changé. L’atmosphère était trouble, ouatée, les bruits de la rue me parvenaient comme feutrés, amortis par un lourd rideau, gourds. Je regardai le dos nu de Zoé, que je croyais endormie, à voir la respiration calme qui écartait légèrement ses omoplates. Mais elle ne dormait pas. Elle écoutait. Lentement elle se retourna, les yeux grands ouverts, cherchant à voir si j’avais entendu, moi aussi. Elle me dit, très simplement mais avec un air infiniment sérieux de devineresse : c’est la neige.
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Extrait 2 : Index librorum prohibotorum


A/

Matías entre dans la librairie. Le libraire, qui relève la tête et voit avec effroi entrer le licencié Matías Vázquez de Tormes, Inquisiteur du district, dissimule très vite, sous une peau de chamois, les feuillets sur lesquels il écrivait. Ce fut un éclair. Matías, qui voit tout, a vu le geste, il a vu les feuillets. Le libraire le sait. Mais Matías a surtout vu le visage du libraire et la surprise lui ôte, pour un instant, son assurance : ce libraire, c’est l’homme accourant, éperdu, à chaque bûcher, l’homme prostré et jouissant près des flammes, l’homme qui dévore les feux d’un regard fou. Il reconnaît ces traits qui le hantent, dont il a rêvé toute une nuit présidée par le Malin, le corps chétif derrière la table aussi, les cheveux couleur de cendre.
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Extrait 1 : Éros sonore


B/

En ouvrant les persiennes, je découvris l’épais matelas blanc qui durant la nuit avait recouvert les toits, les voitures, la rue. De mon lit, blottis l’un contre l’autre, mon ventre tout contre son dos, nous apercevions un arbre dont chaque branche était surlignée de blanc, et qui bougeait un peu. Chaque voiture qui passait, en bas, paraissait rouler avec des pneus de coton. Zoé fixait, par la fenêtre, le ciel et l’arbre blanchi, les coins de la vitre embués par le secret travail du gel. Puis elle se tourna vers moi.
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