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Critique de PatrickCasimir


Sous Verdun

Première année de guerre, du 25 août au 9 octobre, le lieutenant pérégrine avec sa section dans la région de Verdun, de tranchée en tranchée, de village en village, de sous-bois en sous-bois… avec pour compagne la Mort inexorable. Elle a un tribut à prélever et, pour cela, on lui offre à profusion, divers moyens, obus, marmites, Lebel, mauser, baïonnettes peut-être… Quelle folie s'est emparée des peuples ! La Mort n'en demandait pas tant. Elle est imprévisible ; quand les poilus s'essayent au repos, au moment où ils s'y attendent le moins, elle les surprend. Dieu sait pourtant combien ils sont vigilants.

Les poilus pérégrinent donc, autour de Verdun, au rythme des ordres, attendant la relève, faisant semblant d'oublier la guerre en se créant comme un espace de vie domestique dans les lieux occupés temporairement, riant, fumant, baragouinant leur argot de poilus avec cette familiarité et cette proximité joyeuse, qu'imposent les circonstances entre gradés et soldats, vite effacées, toutefois, quand les ordres tombent.

Les soldats tombent aussi ; cependant, la tristesse ne dure qu'un instant lorsque la Mort passe. L'écrivain soldat vit et observe tout cela, s'en souvient et note dans ses moments de répit, dessine même.

Plus tard, avec sa plume talentueuse, il fait revivre les tensions, les émotions, l'atmosphère de crainte et les conversations joyeuses ou bravaches au sein de la section. Il fait du lecteur un autre témoin, il lui montre tous ces lieux par où lui et ses soldats sont passés, lieux toujours occupés par la Mort, quelques fois habités par les hommes, quelques fois désertés, et qu'il décrit avec la précision d'une « ekphrasis » au beau style, tout à la fois grave, mélancolique, léger, toujours bouleversant…

Pat.

le second livre est intitulé Nuits de guerre. Je l'ai achevé ce jour, c'est-à-dire ce samedi 13 octobre 2018. Je prends mon temps, ma lecture est lente et souvent interrompue par d'autres lectures. C'est ma méthode.

Que dire par conséquent de Nuits de guerre ? C'est la continuation du même sujet : pérégrinations d'un village à l'autre, d'une colline à une plaine, d'une tranchée à l'autre, d'un bois à une crête, etc. Un étrange sentiment que la section tourne en rond, alourdie de boue, de fatigue, rendues supportables, cependant, par la sodalité, compte tenu des circonstances.

Dans les moments de repos, entre des escarmouches plus ou moins meurtrières, il faut trouver un abri où dormir ; les civils ne se montrent pas toujours généreux avec ces soldats. Il y en a même qui font exagérément monter les prix du peu qu'ils ont à offrir.

Mais il y a les Aubry ! une famille généreuse et solidaire. On oublierait, presque, la guerre. Voilà qu'une cohue formidable vient interrompre brutalement un calme que l'on sait pourtant toujours provisoire ; une voiture pleine de blessés vient de s'arrêter non loin ; l'écrivain-témoin décrit cela avec une certaine distance froide qui cache mal l'émotion qui les submerge, lui et ses compagnons.

Il y a dans ce tas humain sanguinolent des chanceux, une balle au pied, par exemple, et c'est tout ; doublement chanceux d'ailleurs, car c'est le retour à l'arrière pour assez longtemps. Et puis il y a ce soldat à la face engluée de sang jusqu'au fond de la gorge, la langue sectionnée...

La guerre, pouvait sembler abstraite, par ses bombardements lointains. Elle se rappelle dans toute sa violence au mauvais souvenir de tous et laisse planer une mortelle incertitude sur le sort des villages qui subissent, désormais, systématiquement, le feu germanique.

L'écriture du témoin-écrivain est doublement belle. D'une part, elle est parée d'un riche vocabulaire et d'un style classique et photographique qui projete dans l'esprit du lecteur les images et l'atmosphère de la vie quotidienne de la section dans ses moindre détails.

D'autre part, elle est belle des dialogues patoisants, spontanés, de ses soldats qu'il saisit sur le vif (ou invente).

Pat
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