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Critique de JoeBinet


Depuis Edward B. Tylor et James G. Frazer, les ethnologues s'occupaient à dresser l'inventaire des formes des rituels et de leurs mécanismes logiques. Cela donna lieu à un concert d'interprétations magiques, cosmologiques ou ontologiques du rituel. Suite à une « illumination », Arnold van Gennep se lance seul dans une ambitieuse synthèse, en s'intéressant cette fois aux étapes du rituel et à leur enchaînement plus qu'à leur contenu.

Grossesse, naissance, initiation, mariage et mort.

En 1909, il publie Les Rites de passage, regroupant sous cette appellation tous les rites qui, de près ou de loin, concernent l'entrée ou la sortie par rapport à un groupe social. Il montre que ces rites répondent à un modèle spatial : il y a analogie entre l'entrée ou la sortie par rapport à un groupe et le franchissement d'un seuil ou d'une frontière. Souvent un franchissement réel est inclus dans une cérémonie ; ainsi, pour un mariage, celui du seuil de la maison. le coeur de la démonstration concerne les rites de changement d'état et de statut : grossesse, naissance, initiation, mariage et mort. van Gennep montre que les rites de passage sont invariablement structurés en trois phases. Dans la phase préliminaire, des rites de séparation visent à édifier des frontières symboliques autour de l'individu. Ensuite, pendant la phase liminaire, les rites visent à la marginalisation. Enfin, la phase d'agrégation postliminaire consiste en l'incorporation à un nouvel état. Par exemple, dans le culte vaudou du Bénin, les initiés religieux vont d'abord subir un changement physique (rasage des cheveux, etc.) et de résidence, les individus en réclusion devenant objets d'évitement, sujets à des interdits alimentaires, sexuels ou vestimentaires. Ils deviennent hors statut, échappent aux catégories d'âge, de parenté ou de rang.

Ils reçoivent un apprentissage rituel (transe, chant, etc.) et acquièrent un nouveau statut religieux avant que des rituels spécifiques ne les ramènent à une vie normale et établie.

Le schéma ternaire des rites de passage fonctionne comme un idéal-type, il est donc forcément réducteur et on a reproché à van Gennep d'avoir étendu cette catégorie à un trop grand nombre de rites, où l'enchaînement n'est pas toujours aussi visible ni convaincant. Marcel Mauss parlera de ce livre comme d'« une randonnée à travers l'histoire et l'ethnographie ». Ce schéma a cependant l'avantage de rendre compte de la fonction sociale des rites : assurer le passage d'un statut à un autre en imposant une coupure (sociale) sur un processus (biologique) continu.

Un titre passé à la postérité.

L'ouvrage a connu plus tard de nouveaux développements, avec notamment Max Gluckman (les rites de passage visent à résoudre les tensions sociales) puis avec Victor Turner (les rituels d'inversion réaffirment les hiérarchies sociales). L'anthropologue Nicole Belmont a aussi avancé que la plupart des rites de passage s'identifiaient à la naissance dans sa réalité la plus anatomique. Depuis la parution des Rites de passage, le terme est passé à la postérité et dans le langage courant. En anglais, rite de passage se dit... rite de passage. Mais en anthropologie, le terme s'emploie essentiellement pour désigner les rites d'initiation, qui en sont le prototype.
Lien : https://www.scienceshumaines..
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