Nous nous connaissions depuis très longtemps, dix ans au moins, et je crois que nous n'avions jamais eu le moindre fantasme mutuel. Répression sociale ou quelque autre cause, pendant dix ans nous avons été asexués l'un pour l'autre. Et puis un beau jour, boum, quelque chose a éclaté, une bombe, et sous les décombres nous nous sommes enlacés comme des lianes, fondus comme deux métaux dans un chaudron.
Celui qui a dépassé les bornes en tuant et ne peut plus se refréner, a la puissance du taureau, la brutalité de la bête qui emporte les barbelés et les barrières sans que rien ne l’arrête, et qui est capable de mourir dans la tentative mais qui jamais, jamais, ne cessera de pousser. La colère est un taureau fou, et à cet-instant j’étais la colère.
Donc, que les moralistes ne me jugent pas. Les nôtres ont déjà détruit deux générations dans ce pays. Il n'y a plus rien à espérer d'eux. Plus rien, maintenant. Dans ce pays, avec ces gens-là, c'est sans remède.