Le découragement, la dévalorisation à mesure que la durée du chômage s'allonge. Alors oui, je me suis rabattue sur des offres qui n'ont aucun rapport avec ce que je souhaite faire.
La peur dont j'ai parlé à Céline, elle m'accompagne du matin au soir et du soir au matin. C'est une boule dans mon estomac, ma gorge serrée en permanence. Quotidiennement, je croise des gens par terre, dans la rue, et c'est mon visage que je vois chaque fois. J'en ai des sueurs froides et je m'agite comme une mouche dans du miel pour me tirer de ce pétrin qui m'englue.
Je me dissous.
Je m'oublie.
Je m'efface.
Je m'absente.
Je me quitte.
Je ne suis plus moi.
Je suis déjà l'autre.
Celle qui n'est plus rien.
Des petits riens qui sont tellement quand on ne les a plus.
Tout est faux, tout est factice. La vie qu’on nous impose est une comédie où chacun tente d’interpréter un rôle qui n’est pas le sien. Nous ne sommes plus dans la vraie vie. On fait semblant. On fait tous semblant.
On construit des décors où on fait semblant d'être heureux, sans rien écouter de ce que notre corps nous dit, de cette violence que l'on vit quotidiennement.
En étant chômeuse longue durée, j'ai renoncé à tout. Aux vacances, aux projets, aux week-ends, aux sorties, aux fringues. Pas par choix ! Qui de nos jours, peut se vanter de vouloir vivre chichement ? Même les salariés n'arrivent pas à joindre les deux bouts.
Je suis vide de tout, y compris d'attention aux autres.
Ne penser à rien d’autre qu’à faire des gestes simples. Ne plus être exposé à toute cette fureur des grandes villes, des entreprises, du pouvoir, des dingues.
Mais je suis comme ça, moi, je veux que tout le monde aille bien, et je pense que ça dépend de moi. C'est l'histoire de ma vie, ça...
Ce qu'il faut que vous sachiez, c'est que j'aime travailler ! J'aime l'ambiance d'un bureau qui fonctionne, j'aime remplir ma tâche avec le sentiment du travail bien fait. J'aime aussi, bien sûr, qu'on remarque mes efforts, mes capacités...