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Critique de fabienne2909


« Si tu y réfléchis […], toute notre enfance a été marquée par le malheur, la destruction et la mort. Combien y en a-t-il aujourd'hui qui n'arrivent pas à supporter leurs propres souvenirs ? Ils ont besoin que la vérité soit dite. ». La vérité, Michelle Good entreprend de la raconter dans ce roman qui rend hommage aux centaines de milliers de jeunes Indiens autochtones du Canada, dont sa propre mère, qui ont été arrachés (du XIXe au siècle jusqu'en 1996 !!) à leurs parents pour être envoyés à six ans dans des pensionnats religieux. Officiellement pour leur offrir un avenir meilleur que celui que leurs parents auraient pu leur offrir (et quel avenir dans ces conditions…), mais aussi pour tuer à la racine la culture indienne autochtone.

Comment réussir à vivre sa vie librement quand les traumatismes du passé vous entravent ? Quand ceux qui vous ont éduqués tentaient plus de vous briser que de vous élever ? Michelle Good se concentre ainsi sur le parcours de cinq Indiens une fois les années d'enfer à la Mission d'Arrowhead Bay derrière eux (mais est-ce possible…?) : Lucy, qui vient rejoindre dès son premier jour son amie Maisie, sortie l'année précédente, et qui réussira à faire des études d'infirmière tout en s'épanouissant dans sa maternité et sa vie de couple en pointillés avec Kenny, un ancien pensionnaire de la même mission, qui avait réussi à s'enfuir ; Clara qui se cherchera longtemps avant de trouver sa voie en tant qu'assistante juridique pour les Indiens autochtones en situation judiciaire délicate ; Howie, qui s'était lui aussi enfui et avait réussi à retrouver sa mère avant de passer par la case prison.

Certains s'en sortent presque bien, d'autres beaucoup moins, mais tous partagent la même colère et la même souffrance de devoir vivre avec le boulet du traumatisme à leur pieds, d'être considérés comme des « survivants » alors qu'ils se sentent à peine vivants (« parfois j'ai l'impression que, en réalité, je n'ai pas survécu, que je suis juste un mort qui marche toujours »), de ne pouvoir vivre de bons moments en toute simplicité.
Et pourtant, malgré tout, ils ont su créer entre eux un lien profond, forgé par les épreuves vécues depuis leur enfance et la certitude qu'ils pourront toujours se tenir les coudes. du malheur et de l'adversité peut ainsi parfois sourdre la beauté des sentiments, et ce roman sait le rendre particulièrement bien.

J'ai été traversée par beaucoup d'émotions en lisant ce roman dans lequel je suis entrée de suite, déjà parce que ce morceau scandaleux de l'histoire du Canada assez peu connu ici est totalement révoltant. Comment les autorités d'un pays ont-elles pu penser que des religieux pourraient mieux élever des enfants que leurs parents ? J'ai ainsi été en colère parce que ces religieux ont réussi à tout briser durablement dans ces enfants, leur avenir, leur confiance en eux et même les liens familiaux ou amicaux (être ensemble est un bienfait tout en étant également un rappel de ce qu'ils ont vécu). J'ai été émue par la résilience de ces cinq Indiens, ou en tout cas leur volonté de s'en sortir, même s'ils n'ont pas tous eu les mêmes armes ni le même mental. Ou la même chance.
J'ai aussi été touchée par certains moments de grâce, mis en valeur par la beauté de l'écriture de Michelle Good, qui touchent tous à la culture indienne autochtone : la description des traditions cries, l'apaisement qu'elles procurent à Clara qui est amenée à les connaître grâce à ce formidable personnage qu'est Mariah, est vraiment fascinante et très belle. On sent que l'autrice est attachée à sa culture, et qu'elle la met en valeur, grâce à ces beaux personnages qui resteront longtemps dans ma mémoire. J
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