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Critique de Presence


Ce tome comprend 4 récits mettant en scène la juge Cassandra Anderson, pendant ses années de formation. Il contient les épisodes initialement parus dans les numéros (progs) de l'hebdomadaire 2000 AD 1734 à 1739, 1780 à 1785, 1783 à 1789 et annuel 2011, entre 2000 et 2013, tous écrits par Alan Grant. La couverture a été réalisée par Glenn Fabry. Ces histoires sont en couleurs. Ses aventures ont été regroupées en 5 recueils, à commencer par Judge Anderson: The Psi Files Volume 1. Il existe également un recueil spécifique pour les aventures écrites par Alan Grant et dessinées par Arthur Ranson : Judge Anderson: Samballa.

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- Annual 2011 (6 pages, dessins & encrage de Patrick Goddard) - Pour sa septième évaluation, Cassandra Anderson (10 ans) est emmenée par le Psi-Juge Mahern sur le lieu d'un crime : un individu assassiné, dont le visage a été dépecé par le meurtrier.

En 6 pages, Alan Grant montre une des étapes de la formation de Cassandra, à un âge tendre, confrontée directement à la barbarie d'un crime, et même au criminel. Les dessins de Patrick Goddard (également dessinateur de Savage: The Guv'nor de Pat Mills) sont descriptifs et réalistes, un peu trop propres sur eux. le récit est très rapide avec une première expérience d'une grande dureté, et la mise en avant de plusieurs traits de caractères de la Psi-Cadet. 4 étoiles.

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- Teenage Kyx (36 pages, dessins et encrage de Carlos et Hector Ezquerra, progs 1734 à 1739) - Sous le tutorat de la Juge Rand, Cassandra Wilson (encore adolescente) apprend à projeter son esprit hors de son corps pour observer la ville. Elle repère un bus rempli de criminels ayant comme destination un centre commercial gigantesque. Sous les ordres de la Juge Rand, elle déclenche une opération d'intervention dans ce centre commercial. Il apparaît que cette attaque organisée constituait une diversion pour que Malinda Kyx puisse réaliser un cambriolage ailleurs, sans être dérangée par les Juges. Kyx dispose d'un pouvoir psi qui la rend invisible aux caméras de surveillance. La Juge Rand décide que Cassandra Anderson doit infiltrer le gang de Kyx.

La formation de Cassandra Anderson se poursuit, avec l'entraînement à une nouvelle capacité psychique : projeter son esprit en dehors de son corps. le lecteur ne peut que constater qu'elle tombe bien opportunément et du premier coup sur une opération louche. Néanmoins, l'idée d'un groupe de malfrats s'associant pour réussir un pillage de centre commercial a quelque chose de réellement inquiétant et l'intervention des Juges permet de montrer qu'ils prennent très au sérieux les capacités de leurs nouvelles recrues, en leur faisant confiance. Carlos Ezquerra est un artiste habitué des pages de 2000 AD depuis qu'il a participé à la création de Judge Dredd en 1977. le lecteur retrouve sa manière bien à lui de réaliser des traits de contours un peu râpeux, et d'autres très lisses (en particulier pour les casques des Juges), ainsi que sa propension à utiliser des gros plans pour lors des scènes de dialogue, et à s'affranchir de dessiner les arrière-plans.

D'un autre côté, Ezquerra sait rendre vivantes toutes les séquences, y compris les plus outrées. Les grosses brutes qui investissent le centre commercial font peur à voir avec le regard bas du front, tout en étant chacune distincte de l'autre, avec des particularités qui rend chaque gros bras unique. Cet artiste trouve une solution premier degré et efficace pour montrer comme Malinda Kyx réussit à ne pas être enregistrée par les caméras de surveillance. Il crée des bouilles pas possibles pour chaque protagoniste, leur donnant ainsi une forte personnalité. Il est difficile de rester de marbre devant la moue perpétuelle de Malinda Kyx, causée par sa dentition particulière. le lecteur peut également apprécier son assurance, visible dans ses postures et dans son langage corporel, engendrée par la certitude de ne pas être détectée, et son allure un peu vulgaire. La narration visuelle d'Ezquerra est impeccable pour les séquences d'action, y compris la surveillance par un drone espion. le pragmatisme de ses dessins fait mouche pour l'humour noir, lorsqu'un agresseur perd bêtement ses 2 bras, tranchés des scies circulaires.

Même si l'histoire commence sur une coïncidence un peu trop grosse pour être honnête, Alan Grant raconte une histoire dense en 36 pages, avec une attaque de centre commercial, une tentative de vol à main armée et une infiltration à haut risque pour Cassandra Wilson. le récit est donc rapide et comprend de nombreux rebondissements. Outre le plaisir de voir une autre phase de formation de l'héroïne, le lecteur peut à nouveau apprécier sa réelle empathie, grâce à une direction d'acteur faisant ressortir sa sensibilité. 5 étoiles.

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- Algol (36 pages, dessins & encrage de Steve Yeowell, proges 1780 à 1785) - Cassandra Anderson assiste à un cours donné par un juge pour une classe de cadets. Elle réussit à répondre à la question qu'il pose sur la qualité essentielle des juges, à savoir l'intuition. Elle part ensuite patrouiller dans Megacity One, avec Walker, un autre cadet, et la Juge Rand. le petit groupe est appelé sur les lieux d'un crime qui vient d'être commis. Il s'agit d'une jeune femme assassinée par des professionnels. La piste de l'enquête les mène à rechercher Algol Rey, un ancien cadet de la division psi, qui avait dû être en partie lobotomisé pour avoir abusé de ses pouvoirs à l'académie.

Les dessins de Steve Yeowell apparaissent un peu fades par comparaison avec ceux plus organiques de Carlos Ezqerra, ou ceux plus détaillés de Patrick Goddard. Il raconte bien l'histoire, mais les traits de contours sont un peu fins et ne sont pas jointifs, ce qui donnent une impression de manque de consistance, renforcée par les décors, tout aussi régulièrement absents que chez Ezqerra, mais en plus tracés avec des traits pas très réguliers, comme s'ils avaient été exécutés à la va-vite. Néanmoins, les cases racontent clairement le récit.

Alan Grant construit une enquête tout aussi substantielle que la précédente, avec une progression régulière, mais aussi quelques difficultés. Il base l'intrigue sur la vengeance d'un cadet ayant échoué à rentrer dans le moule imposé par le processus pédagogique des juges. Outre le premier degré de l'enquête et les affrontements physiques (rendus plus compliqués par les capacités psychiques d'Algol Rey), le lecteur peut aussi apprécier la comparaison qui s'installe entre le propre parcours scolaire de Cassandra Anderson, et celui d'Algol Rey, et observer ce qui fait qu'elle se montre apte à réussir en tant que juge, alors que lui ne l'a pas été. Il peut aussi constater comment l'académie des Juges se débarrasse des individus ayant échoué, leur montrant autant de commisération qu'aux autres coupables. Alan Grant n'a pas perdu son sens de l'humour très sarcastique, puisque la Juge et les 2 cadets interviennent au pied d'un Centre d'accueil pour personnes à la rue, appelé Trump.

Cette histoire montre une phase de l'acquisition de compétences par Cassandra Anderson, sur la base d'un scénario disposant d'une solide intrigue, et qui n'oublie pas de développer la personnalité de son héroïne. Les dessins sont plus fonctionnels que dans les premières histoires ce qui obère un peu la qualité de la narration. 4 étoiles.

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- One in ten (dessins et encrage de Carlos Ezquerra, progs 1783 à 1789) - À la tête d'une équipe de 4 cadets, Cassandra Anderson réalise une mission d'infiltration et de capture dans un bâtiment abritant un trafic d'organes de nature particulièrement odieux. Il s'agit d'un établissement social ayant vocation de prendre soin de nourrissons orphelins, jusqu'à temps qu'ils soient adoptés par une famille. Ils découvrent qu'une partie des nourrissons servent à fournir des membres et des organes aux autres, une ferme d'organes humains de la pire espèce. Les 5 cadets en réfèrent à leur Juge de référence qui accepte qu'ils mènent à terme l'enquête.

Alan Grant ne fait pas semblant avec les sujets d'enquête qu'il choisit pour son héroïne. Cette fois-ci, il verse dans le sordide écoeurant, mais malheureusement pas complètement impossible. Il continue donc ainsi à confronter Cassandra Anderson aux pires exactions dont la race humaine peut se montrer coupable, attestant ainsi sa capacité à surmonter ces confrontations traumatisantes. le scénariste ouvre son récit en évoquant Platon et Aristote, attribuant au premier l'avis que 9 personnes sur 10 sont des individus enclins à la violence, alors que le second penche plutôt pour une nature humaine bonne, seul 1 individu sur 10 étant enclin à la violence. Au cours du récit, Alan Grant reprend cette quantification de 90% et de 10% pour l'appliquer aux cadets, et en particulier à ceux qui se suicident au cours de leur formation. Il s'agit à nouveau de faire apparaître ce qui rend l'héroïne si particulière, même parmi les autres juges mais aussi d'évoquer la brutalité de se retrouver contraint de contempler toute l'horreur dont l'humanité est capable.

Pour ce quatrième récit, le lecteur a le plaisir de retrouver la familiarité des dessins de Carlos Ezquerra. Sa façon un peu désinvolte de représenter certaines formes lui permet d'éviter de tomber dans le voyeurisme malsain lors de la découverte des nourrisson amputés de certains de leurs membres, sans pour autant laisser planer de doutes quant à ce dont il s'agit. Les dessins évitent également de sexualiser exagérément les différents protagonistes, aussi bien féminins que masculins, donnant plus d'importance à leurs actions, à leurs paroles, et à leur personnalité. Il met en scène les conditions du suicide du cadet Alberto Calvi avec la même adresse, montrant sa détresse et l'horreur de son acte, sans que le lecteur n'éprouve l'impression qu'il transforme ce moment en spectacle odieux. Comme à son habitude, Ezquerra se montre convainquant quoi que l'intrigue puisse exiger qu'il dessine, des cuisines d'un restaurant, à une propriété luxueuse située dans une zone verdoyante.

Alan Grant et Carlos Ezquerra réussissent à nouveau une histoire poignante ans être misérabiliste sur cette étape du parcours scolaire de Cassandra Anderson, mettant en avant ses qualités professionnelles, ses qualités d'être humain, dans une intrigue basée sur une enquête difficile, pour des crimes abjects. le lecteur peut donc aussi y lire un commentaire sur la nature humaine, comme dans tout bon polar qui se respecte. 5 étoiles.
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