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Critique de nadejda


C'est « dans la torpeur d'une volumineuse salle de lecture de la bibliothèque Lénine » à Moscou que ce voyage avec «L'hiver aux trousses»  a commencé à prendre corps dans la tête de Cédric Gras qui nous offre un livre flamboyant sous les couleurs de l'automne qu'il va suivre au fur et à mesure de son avancée dans l'extrême-orient russe. Son but, traverser et réunir trois automnes en un seul entre Yakoutsk et Vladivostok dans une course contre l'hiver qui parfois arrivera plus tôt que prévu.
Bien sûr la poésie et la beauté automnale ne seront pas toujours au rendez-vous mais la multiplicité des rencontres comme celle de vieux croyants qui rentrent après un exil de 80 ans,
« Car le miracle avait eu lieu. Un beau jour de 2010, ils étaient revenus, les vieux-croyants. Pendant quatre-vingts années, ils avaient défriché la terre de Mandchourie et puis celle de Bolivie, du Paraguay ou du Brésil avant que quelques familles ne remettent le cap sur la mère-patrie et ne sifflent la fin de leur exil. Les gardiens obstinés des rites russes les plus anciens s'acharnaient désormais à féconder la terre de leurs ancêtres. Ils avaient troqué leurs jungles sud-américaines contre les -40 °C hivernaux de la rivière Imane. L'Église orthodoxe officielle et Moscou ont signé la paix avec cette communauté disséminée de par le monde et les coins les plus reculés de la Fédération de Russie depuis les répressions et le patriarche Nikon.
Moscou avait envoyé ses émissaires au Nouveau Monde et en Australie. Des réunions furent organisées en Bolivie ou à Montevideo. Il s'agissait de vanter le programme d'aide au retour des Russes de l'étranger. En 2008, quelques éclaireurs vinrent en reconnaissance. Dès le printemps, six familles débarquèrent avec armes et bagages après un cocasse transit à Paris où la sécurité confisqua leurs lance-pierres. La Fédération régla tout et offrit un petit pactole de bienvenue. le village de Dersou (Layoliu), abandonné depuis la chute de l'URSS, reprit vie. »,

les remarques sur la porosité des frontières orientales avec La chine et la Corée qui viennent piller les richesses de la taïga et bien d'autres, sur le passé et le devenir de toutes les régions qu'il parcourt, viennent compléter et enrichir un périple que j'ai aimé autant que le précédent qui m'avait fait perdre le Nord ou plutôt l'Est puisque « Le Nord c'est l'Est ». S'ils se recoupent parfois cela n'est pas gênant car l'auteur revient dans ces régions avec un oeil neuf et un angle de vue différent.

Cédric Gras aime les confins et plus particulièrement l'Orient. Ce récit est plus construit et d'une écriture plus « travaillée » que le précédent. Tout en gagnant en poésie il reste d'une beauté simple.

Dans le jardin botanique de Ioujno-Sakhalinsk il réalise :
«… toute cette grande course automnale que j'avais échafaudée vers Vladivostok a un nom au pays du Soleil Levant : momijigari, la « chasse aux feuilles rouges ». La tradition veut que les Japonais aillent admirer à l'automne le koyo, le rougeoiement des feuilles. Les étoiles de cette saison sont les érables japonais, momiji, que je contemplais dans ce jardin botanique. La saison du koyo commence sur l'île d'Hokkaido et court vers le sud… Les Tokyoïtes poursuivent le bal plus tard dans la saison avant que celle-ci ne s'achève sur l'île de Kyushu. Ce vaste voyage, de la Yakoutie aux frontières des Corées, n'était rien de plus qu'un vaste momijigari.
et (…) Ce qui est sûr, c'est que soudain je compris que les couronnes chamarrées au pied des arbres flamboyants n'avaient d'égales que les tapis de pétales au pied des arbres en fleurs. Les Japonais célèbrent par le hanami et le momiji deux splendeurs du temps. L'automne rivalisait de féérie avec le printemps lui-même. »
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