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Critique de Pascalmasi


L'Histoire est sélective. Elle retient la bataille de Salingrad et ignore le siège de Léningrad. Elle commémore le 6 juin 1944 et n'a pas même noté la date du débarquement de Provence. Elle croit Turing l'inventeur de l'ordinateur moderne et ignore même l'existence de von Neumann.

Et célèbre Darwin et a tout oublié de Lamarck.

Erreur regrettable selon Fabien Gruhier car Jean-Baptiste Lamarck, le père de la biologie moderne (il est l'inventeur du mot), est le premier à avoir formulé une théorie à caractère scientifique de la probable transformation des espèces en d'autres espèces. Et cela depuis les origines mêmes de la vie. Il n'est d'ailleurs pas l'inventeur du concept de transformation, que l'on nommera après Darwin « évolution », car ce concept était lui-même plus ancien et on le doit probablement à un certain Maupertuis, botaniste du XVIIIe.

En revanche, il est le premier à avoir imaginé des principes, des lois applicables à la transformation du vivant. L'auteur, Fabien Gruhier, explique d'ailleurs que Charles Darwin avait lu Lamarck.

Mais les hommes sont les hommes.

Lamarck, grand scientifique botaniste et biologiste, n'avait pas le don de la politique ni des rapports humains apaisés. Il se mit donc tous les puissants de son temps à dos : Napoléon et Cuvier dont on apprend qu'il était un arriviste peu scrupuleux. Ce fut une très mauvaise idée. Il finit sa vie dans la misère et son oeuvre dans l'oubli.

C'est donc Darwin qui avec la publication « de l'origine des espèces » emportera la mise et passera pour le génial créateur du concept de la «variation avec descendance par la sélection naturelle ».

Mais comme souvent, l'Histoire n'avait pas dit son dernier mot. L'élaboration du concept d'épigénétique à la fin du XXe siècle – c'est-à-dire l'ensemble des interactions nombreuses et complexes qui se nouent entre le génome darwinien et le milieu dans lequel se trouve le vivant – ont redonné à la théorie de Lamarck toutes ses lettres de noblesse. Il existe bien des caractères acquis qui peuvent être transmis. Et les cas sont innombrables.

Deux exemples emblématiques de la réhabilitation lamarckienne :
Les renards polaires changent de robe l'été et l'hiver. C'est l'environnement qui modifie l'expression des gènes qui gouvernent la couleur des pelages du sympathique animal. Cette transformation n'est pas darwinienne mais lamarckienne.

Les civilisations humaines (ce qui nous concerne directement !) :
Pour vivre correctement, tous les humains du monde ont un besoin vital de savoir lire et écrire. Cet apprentissage est lamarckien car personne n'a jamais constaté que la lecture était inscrite dans les gènes. Chaque génération doit donc recommencer à zéro et acquérir ces facultés. L'Histoire des civilisations n'aurait pas été possible sans l'existence conjointe des deux évolutions : celle de Darwin qui nous donne notre cerveau hors norme comme celle de Lamarck qui nous permet d'enseigner aux enfant l'écriture et la lecture.

Les deux avaient raison. Les deux méritent d'être connus et célébrés.

Balle au centre !

Le livre se lie très bien. Un ton quelque peu caustique et sarcastique même qui fait du bien. A lire si l'on s'intéresse à l'avancée de la compréhension des sciences du vivant et à l'histoire des idées.
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