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Critique de gerardmuller


Paroles d'étoiles (Mémoire D enfants cachés de 1939à 1945) /Jean Pierre Guéno
Ce petit ouvrage bien conçu de 150 pages nous présente des témoignages bouleversants recueillis en 2002, d'enfants déportés ou cachés lors de la seconde guerre mondiale.
Une très belle présentation par J.P.Guéno initie ce recueil :
« Certains hommes ont brisé les quatre bras de la croix dans le sens contraire des aiguilles du temps pour montrer à quel point ils maitrisent le pouvoir d'inverser l'ordre des choses et de distribuer la mort. »
J.P.Guéno nous explique que certains idéologues français purent être plus nazis que certains nazis en traduisant leur fanatisme dans des textes de loi.
Des camps d'internement (au nombre de 44) en France furent aménagés un peu partout, de Rivesaltes à Drancy et de Beaune la Rollande à Pithiviers avec noté sur la fiche d'internement du sujet : Cause d'internement : en surnombre dans l'économie nationale !!
Dans les restaurants, on put lire à l'entrée : interdit aux chiens et aux Juifs !!
Les enfants de l'époque qui ont échappé à la mort ou qui ont pu se cacher se souviennent en 2002, et racontent ce que leurs yeux d'enfants ont vu alors. Les souffrances physiques et morales, les privations, la maladie, les coups, la peur, une peur viscérale, etc…
En 1939 il y avait 72 000 enfants d'origine juive en France.
Marqués de l'étoile jaune comme leurs parents, 12 000 d'entre eux furent éliminés méthodiquement par les nazis avec la complicité des autorités françaises.
Beaucoup furent cachés par des familles qu'on a appelés les « Justes » bravant tous les dangers.
« Pouvez-vous imaginer qu'à neuf ans, quelqu'un vous regarde dans les yeux et vous dise : à partir de maintenant tu t'appelles comme ça, tu es seul au monde, tu n'as pas de frères ni de soeurs et tes parents sont morts dans les bombardements. Quoi qu'on te dise, quoi qu'on te fasse, tu diras toujours la même chose sinon on te tuera. »
Imaginez le drame de ces enfants cachés survivants qui voient revenir un ou deux parents des années plus tard qu'ils ne reconnaissent pas, et qui vont devoir être arrachés à leurs parents « adoptifs » du temps d'une guerre !
Témoignage : « Si c'est pour ne plus reconnaître maman, il vaut mieux qu'elle ne revienne plus ! Dire papa à ce monsieur avait sans doute été traumatisant, mais l'était plus encore toute la tragédie qu'il incarnait et qu'il me rappelait : celui d'une famille si harmonieuse, si chaleureuse à jamais disloquée, fracassée… »
« Dans la tourmente, j'avais perdu mon nom et par la même occasion celui qui me l'avait donné. Enfant de personne… »
Deux témoignages entre autres dans un autre domaine :
« Ce 16 juillet 1942, il ya eu 7000 assassins en uniformes. Tous français. Tous glorieux. Tous ignobles. Intermédiaires de la Gestapo, drapés dans le respect de la légalité. »
« Dans Bordeaux, il en sortait de partout de ces brassards tricolores ! Résistants de la dernière heure et collabo de la première. Tous clandestins, tous héros de l'ombre…C'était à se demander comment les Allemands avaient pu survivre sans être étouffés par tant de héros… »
« Je crois que collectivement en France, à la Libération, il y a eu la volonté de jeter un voile, d'oublier beaucoup de choses qui s'étaient passées… »
« Les traumatismes des enfants qui étaient très petits au moment de l'Occupation n'ont pas été pris au sérieux. La société a occulté une grande partie des problèmes de l'Occupation. »
C'est un petit livre qu'il faut lire histoire par histoire, chacune de ces histoires suscitant un temps de réflexion indispensable. Une ou deux pages chaque jour. On a vraiment du mal à imaginer que cela s'est passé il y a à peine 72 ans ! Une ère de barbarie absolue.
Totalement bouleversant.
À noter les annexes très intéressantes en fin d'ouvrage sur le Mémorial de Caen, l'Association des enfants cachés, le Centre de documentation juive contemporaine et le Comité français pour Yad Vashem. Et une importante bibliographie.
« Les drapeaux et les religions, je m'en méfie comme de la peste. »


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