AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Renod


Renod
02 septembre 2017
La justice des Hommes est si imparfaite qu'on aimerait parfois croire en une justice céleste qui passerait au crible la vie des défunts pour les diriger au gré de leur moralité vers les cercles de l'enfer, du purgatoire ou du paradis. Nous sommes à la fin des années 40 et des hommes plaisantent en allemand dans un salon bourgeois de Buenos Aires. La vie est belle pour Eduard qui a fait assassiner pendant la guerre trente mille juifs lettons, pour Herbert dont le loisir était d'enfermer des juifs dans leur synagogue avant d'y mettre le feu, pour Gerhard qui a fait gazer soixante-dix mille handicapés ou encore pour Josef qui sélectionnait les déportés à leur arrivée à Auschwitz. Alors bien sûr, les mois qui ont suivi la fin de la guerre ont été délicats pour eux. Il leur a fallu être discrets puis choisir l'exil sur un autre continent. Direction l'Argentine où ils sont accueillis à bras ouverts par le Président Perón. Ce dernier parie sur l'émergence d'une troisième voie, entre les impérialismes américain et soviétique et offre un refuge aux savants et aux criminels de guerre nazis. Si des réseaux ont permis les exfiltrations, d'autres aident à leurs installations. Et certains d'entre eux – bien qu'inscrits sur une liste de criminels de guerre en Allemagne- prospèrent rapidement et envisagent même de reprendre le pouvoir en R.F.A. Mais le vent va tourner. Les chasseurs de nazis et le service de renseignement israélien du Mossad organisent la capture d'Eichmann. Les criminels vont devoir se terrer au cœur de la jungle.

Le livre est centré sur Josef Mengele, surnommé « l'ange de la mort », mais son parcours illustre celui des nombreux criminels exilés en Amérique du Sud. Il a été un des médecins en charge de la sélection au camp d'Auschwitz. le front proéminent, un trou entre les dents, le regard perçant et des sourcils méphistophéliques, il se distinguait de ses collègues par son investissement. Il a mené de nombreuses expérimentations sur les déportés avec un sadisme effrayant. Dans sa fuite, il bénéficiera du soutien de sa famille, de riches industriels de Bavière. Il connaîtra la paranoïa, la solitude et la misère mais jamais, au grand jamais, le repentir. Olivier Guez a opté pour la fiction pour passer outre les nombreux points restés obscurs de cette « disparition » parfaitement orchestrée. Ce roman est un nouvel éclairage opportun sur la période qui suivra la Shoah. Et on s'étonne que la prise de conscience de cette tragédie ait été si tardive dans un monde entré en pleine Guerre froide. L'auteur sait clarifier un contexte politique et peindre des psychologies minées par des conflits personnels ou des inimitiés. Une lecture terrifiante mais salutaire.

Merci à Netgalley et aux éditions Grasset de m'avoir permis de découvrir ce roman.
Commenter  J’apprécie          421



Ont apprécié cette critique (36)voir plus




{* *}