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Critique de Agneslitdansonlit


Je me suis laissée entraîner dans ce premier roman de Stacey Halls, malgré parfois un aspect d'inachevé, pas assez exploré et manquant de régularité dans l'intérêt de l'intrigue. Je suis un peu sévère, mais très certainement car l'auteur a fait un choix de sujet et de contexte très intéressant et qui sûrement, aurait pu être exploité de façon plus approfondi.

• Fleetwood Shuttleworth, jeune châtelaine âgée de 17 ans, bien mariée à Richard, un noble dont une carrière prometteuse de shérif du comté se dessine, se trouve être l'héroïne de ce roman. Il faut donc d'ores et déjà dissiper les espoirs à décevoir des lecteurs qui penseraient aborder de l'intérieur l'univers des sorcières du 17ème siècle, et notamment l'historique procès de Pendle. Si ce malheureusement célèbre procès a bien eu lieu en juillet 1612 sous le nom de "Procès des sorcières du Lancastre", le roman n'utilise que comme une trame historique le contexte et ne s'appesantit en aucun cas sur le procès, de même que si l'autrice reprend bien les identités des accusées, leurs vies et leur us et coutumes ne seront pas détaillés. Il est vrai que c'est un peu frustrant de les côtoyer de loin et de ne jamais pouvoir entrer réellement dans leur histoire, dans leurs vies au quotidien.
• L'histoire se fonde principalement sur Fleetwood, qui malgré son jeune âge, a déjà vécu quelques années douloureuses. Son mariage avec Richard apparaît dès le début comme salvateur affectivement dans sa jeune existence. À 17 ans, elle a déjà supporté 3 fausse-couches et tente de mener à son terme la quatrième.
C'est alors qu'elle fait la connaissance d'Alice Gray, (dans des circonstances qui entoureront ce personnage de mystère), jeune sage femme qui soigne ses patientes grâce aux vertus des plantes médicinales, don qu'elle a hérité de sa mère.
C'est donc l'histoire de deux femmes qui s'émancipent, l'une car elle refuse les sage femmes plus "traditionnelles" conseillées par son entourage qu'elle défie en se tournant vers une inconnue, l'autre car elle ose en tant que femme acquérir un savoir médical, qui plus est efficace, et qui repose sur l'usage des plantes. Il n'en fallait pas plus pour laisser planer l'opprobre sur ces 2 femmes qui ne courbent pas l'échine, et tout le roman n'est en réalité pas centré sur les sorcières mais bien sur la quête d'indépendance et de reconnaissance de ces dernières, ainsi que sur leur amitié.

• Ce récit met parfaitement en valeur la condition peu enviable du sexe féminin, quelle que soit sa condition sociale : les plus modestes triment pour gagner leur pitance et supportent souvent des maris ou conjoints qui, aidés par la boisson, finissent d'assombrir ce tableau sans espoir. Quant aux femmes des nobles ou riches commerçants, elles sont bien souvent une monnaie d'échange entre familles dont les unes détiennent le titre et les autres les cordons de la bourse... Investissement que l'on prie de bien vouloir faire ce pour quoi il est fait : procréer !
Le choix de Fletwood de placer sa confiance et sa grossesse dans les mains d'une sage femme peu conventionnelle et qui malgré elle, sera mêlée à des accusations de sorcellerie, va fissurer sa tranquille existence auprès de son mari, va remodeler ses difficiles rapports à sa mère et modifier sa perception des personnes de son entourage.

• J'ai apprécié le tableau dramatique de ce qui mène à un procès en sorcellerie et qui touche à la folie des hommes, qui les fait basculer de "bon père de famille" un jour à inquisiteur sans vergogne le lendemain. Une démence collective qui peut placer n'importe qui sur le bûcher au nom du fanatisme ! L'autrice dépeint parfaitement ces milieux d'une extrême pauvreté où naissent des croyances et des rites païens qui feront le terreau des accusations en sorcellerie. Ce ne sont pourtant que de pauvres hères, survivant dans la misère, l'insalubrité, la faim et qui tissent leur propre culture populaire, parfois fondée sur les sorts, les envoûtements, la magie... Qui n'engagent que ceux qui y croient ! Et à travers les procès en sorcellerie, n'est-ce pas tout simplement le procès en pauvreté d'indigentes qui vivent par la force des choses en marge? Cette critique là de la société du 17eme siècle m'a paru très pertinente.

• J'ai par contre eu plus de mal à adhérer à l'histoire de ce couple entre Richard et Fletwood, qui oscille tout au long du récit, entre un couple idéal et puis finalement suite à des révélations inattendues, pas si exemplaire. le personnage de Richard ne me paraît pas cohérent: trop de revirements dans l'attitude de ce personnage. Ce roman n'est pas un pavé : aborder autant de sujets présente le risque d'en délaisser certains au profit d'autres. le personnage de Richard, du mari omnipotent, en souffre.

• C'est au final un roman qui se lit facilement et avec beaucoup de plaisir, les personnages sont attachants, on prend fait et cause pour Fletwood, dont on suit, parfois le coeur palpitant, la quête de liberté et le combat contre l'obscurantisme.
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