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Citations sur Hiroshima, fleurs d'été (31)

En chemin mon neveu s'était mis à vomir un liquide blanc. Il avait fui et pris le train avec un ami chez lequel il s'était réfugié: là, on s'était bien occupé de lui. Mais un peu plus d'une semaine après son retour parmi nous, il commença à perdre ses cheveux et devint complètement chauve en deux jours. On disait alors un peu partout que, cette fois-ci, les gens blessés dont les cheveux tombaient et qui saignaient du nez n'avaient pas beaucoup de chance de s'en sortir. Douze ou treize jours après la chute de ses cheveux, mon neveu se mit à saigner du nez.
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J’eus la vie sauve parce que j’étais aux cabinets. Ce matin du 6 août, je m’étais levé vers huit heures. La veille au soir il y avait eu deux alertes aériennes mais rien ne s’était passé. Un peu avant l’aube je m’étais déshabillé et, chose que je n’avais pas faite depuis longtemps, je m’étais couché en kimono de nuit. Je me levais et entrai dans les cabinets sans répondre à ma sœur qui, en me voyant encore en caleçon, grommela que je me levai bien tard.

Quelques secondes plus tard, je ne sais plus exactement, il y eut un grand coup au-dessus de moi et un voile noir tomba devant mes yeux. Instinctivement je me mis à hurler et, prenant ma tête entre mes mains, je me levai. Je n’y voyais plus rien et n’avais conscience que du bruit : c’était comme si quelque chose telle une tornade s’était abattu sur nous.
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Shôzô pensait que l’alerte n’allait plus tarder. Effectivement, l’imposante sirène se mettait à hurler dans le noir, venant de toutes les directions à la fois. Quelle horrible plainte, à la fois basse et suraigüe ! On aurait dit les gémissements d’une bête blessée. Comment les historiens la qualifieraient-t-ils plus tard ?
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Dans le vide argenté qui s’étendait sous le soleil brûlant et aveuglant, il y avait une route, une rivière, un pont, et ici et là des corps boursouflés, les chairs à vif. C’était sans aucun doute la matérialisation, grâce à des méthodes précises et très élaborées, d’une nouvelle forme d’enfer.
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Pour transcrire ce que je ressentir à la vue de ce paysage irréel, j'emploierai une forme particulière de l'écriture japonaise, les katakana.

Débris étincelants
S'étirent en un vaste paysage
Cendres claires
Qui sont ces corps brûlés aux chairs à vif
Rythme étrange des corps d'hommes morts
Tout cela exista t-il ?
Tout cela à t-il-pu exister ?
Un instant et reste un monde écorché à vif
À côté des trains renversés
Le gonflement des carcasses de chevaux
l'odeur des fils électriques qui peu à peu se consument en fumant
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Quand je me rendis par précaution chez le médecin pour passer une visite afin de lui montrer ces tâches, il y avait une foule de patients qui faisaient la queue qu'au bout du jardin. Parmi eux, une dame expliqua avoir été atteinte par l'explosion à Otemachi tandis qu'elle rentrait à Hiroshima en venant d'Onomichi. Ses cheveux n'étaient pas tombés mais elle perdait des caillots de sang depuis le matin. Elle était apparemment enceinte et sur son visage las se lisait une angoisse insondable, et on voyait apparaître les signes d'une mort prochaine.
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Quand je tournai la tête, je vis la chaîne des montagnes de basse altitude qui absorbait doucement les teintes du crépuscule et au loin, un sommet touché par les rayons du soleil brillait d'un éclat éblouissant. Ce paysage paraissait irréel. On n'avait plus à craindre de raids aériens et maintenant, le silence se propageait enfin dans la voûte céleste qui retrouvait la paix. Soudain, je me sentis comme quelqu'un venant d'être projeté à terre par l'explosion de la bombe atomique. Tout de même, ces gens qui agonisaient ce jour là sur la grève de Nigitsu et les berges proches de Sentei, dans des souffrances à en perdre la raison, et ses décombres laissés par l'incendie, loin de l'image de ce paysage paisible, que devenaient-ils donc?
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Tout élément humain avait été exterminé. Ainsi, par exemple, l'expression humaine des cadavres avait fait place à une sorte de rictus mécanique de mannequin. Les corps, dans un ultime instant de lutte contre la souffrance, semblaient s'être raidis dans un rythme troublant. Les fils électriques tombés et emmêlés, les innombrables débris faisaient penser à un dessin convulsif tracé dans le vide.
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Comme nous avancions sur l'étroit chemin de pierre qui longe la rivière, je vis pour la première fois des grappes humaines défiant toute description. Le soleil était déjà bas sur l'horizon, le paysage environnant pâlissait. Sur la grève, sur le talus au-dessus de la grève, partout les mêmes hommes et les mêmes femmes dont les ombres se reflétaient dans l'eau. Mais quels hommes, quelles femmes...! Il était presque impossible de reconnaître un homme d'une femme tant les visages étaient tuméfiés, fripés. Les yeux amincis comme des fils, les lèvres, véritables plaies enflammées, le corps souffrant de partout, nus, tous respiraient d'une respiration d'insecte, étendus sur le sol, agonisant. A mesure que nous avancions, que nous passions devant eux, ces gens à l'aspect inexplicable quémandaient d'une petite voix douce : "De l'eau s'il vous plaît, de l'eau...", ou encore nous suppliaient : "Faites quelque chose, sauvez-nous...". Presque partout ce n'était que plaintes.

Extrait de "Fleurs d'été"
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Et lorsqu'il montait dans le tramway où se côtoyaient toutes sortes de gens, M.Maki voyait également souvent des passagers lui faire un signe de tête, de part et d'autre. Quand lui-même répondait sans bien réfléchir par un signe de tête, il arrivait qu'on lui dise par exemple:" Mais vous n'êtes pas M.Yamaha!", car on l'avait pris pour un autre. Alors qu'il venait de raconter cette anecdote à un interlocuteur, M.Maki comprit qu'il n'était pas le seul à se faire saluer par un inconnu. En effet, il y avait continuellement à Hiroshima quelqu'un qui recherchait, maintenant encore, une personne.
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