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Critique de AmeliaChatterton


Dans le cadre du Bingo à Vapeur dédié à la découverte de la littérature steampunk, je me suis lancée dans la lecture de ce recueil de 4 nouvelles aux styles assez variés. de jolies découvertes sur le thème de la mécanique et de la lutte des classes.

Mon avis sur le recueil

Un recueil de nouvelles totalement steampunk et totalement féminin surtout. Ici, les quatre nouvelles sont écrites uniquement par des autrices françaises, alors que le recueil précédent équilibrait les genres.

Le sujet exploité ici est la lutte des classes et la mécanique et chaque autrice a su apporter son univers autour de ce thème assez contestataire. On sent venir les grèves, la peine des travailleurs, le mépris du patronat dans un monde uchronique où les automates remplacent les humains ou les aident dans leurs tâches ingrates. le féminisme est assez présent dans trois des nouvelles, ce qui est assez appréciable.

De manière générale, le recueil est bien équilibré malgré la diversité des univers proposés. Cependant, j'ai eu une préférence pour la nouvelle Bang Bang de Johanna Marines du fait de sa construction et du sujet traité. Ce fût une bonne surprise pour moi car j'ai lu d'autres romans de cette autrice comme Cendres que j'avais peu apprécié. Dans cette nouvelle, j'ai senti une évolution du style de l'autrice très appréciable qui m'a donné envie d'aller plus loin et de lire d'autres livres de sa plume.

Mon deuxième coup de coeur est pour Maudite Lumière de Noémie Lemos dont je découvre la plume, et dont j'ai beaucoup apprécié l'univers et les questionnements induits par sa nouvelle. J'ai envie d'en apprendre davantage sur cette histoire et je serais curieuse de lire un roman sur le sujet.

Chaque nouvelle interroge le lecteur sur un monde mécanique et la manière dont le petit peuple est traité. Une autre manière d'aborder le steampunk sans pour autant s'intéresser à de grosses avancées technologiques. En ce sens, c'est une bonne porte d'entrée pour qui souhaite découvrir la littérature steampunk.

Mon avis pour chaque nouvelle

Bang bang, Johanna Marines

Résumé : Dans un monde où les automates ont pris le pouvoir après des années d'esclavage par les hommes, Andreï Estonwell, petit-fils de leur créateur originel s'est fait capturer par un groupe mécanique. Depuis sa cellule, chaque jour s'égrène d'un coup de feu tandis que les automates le torturent pour mettre la main sur leurs plans de conception. Ils souhaitent pouvoir vivre la seule chose que les humains leur ont refusé : la possibilité de rêver.

Mon avis : Une nouvelle d'une construction magistrale rythmée par des scènes du présent et du passé d'Andreï, et les coups de feu tandis que les jours passent. le récit est narré à la première personne, ce qui accentue l'immersion du lecteur dans ce kidnapping, aux côtés de la victime. J'ai particulièrement apprécié le sujet de fond sur lequel repose cette histoire : dans un monde où les robots remplaceraient les humains sur des tâches fatigantes, leur ôter l'espoir est-il une bonne chose ? Les robots peuvent-ils et doivent-ils rêver ? Qu'est-ce qui définit l'humanité ? Est-ce la capacité à se projeter dans un futur ou la volonté de permettre aux autres de le faire ? le lien entre les robots et des travailleurs humains face à une société déshumanisée ultracapitaliste est assez facile à réaliser. La fin de cette nouvelle, tout comme sa construction est magistralement bien pensée. Elle repose sur l'idée de la créature qui échappe à son créateur. le créateur perdra lui aussi tout espoir à l'issue de cette tragédie, comme une revanche des robots pour ce qu'ils ont dû subir.

La nouvelle élite, Tepthida Hay

Résumé : Rose, jeune ouvrière vit dans une France uchronique qui cultive le Talent en vue de faire progresser la science et l'humanité. Cela occasionne de nombreux concours où chacun peut se démarquer grâce à son intelligence. En vérité, souvent des hommes de bonne famille. Rose décide de participer à un concours de Talent en vue de montrer qu'il manque une chose dans cette société bien huilée : le rêve, l'Art, le beau qui ont tout autant leur place dans ce monde que Le Progrès.

Mon avis : Faire progresser l'humanité sans prendre le temps de rêver ? le monde n'est réservé qu'à une élite dans cette nouvelle qui évoque aussi le terrorisme anticapitalisme que le rêve. On y croisera Jules Verne, blasé par la création scientifique et qui regrette de ne pas avoir poursuivi l'écriture de ses récits de fiction. Rose est une héroïne au courage incroyable dans une société où les femmes de basse condition sont méprisées doublement par les juges masculins des concours de sciences. Elle va devenir une figure d'espoir pour le petit peuple tout en cachant un terrible secret. Mon seul regret concernant cette nouvelle est le style : On sent que l'autrice aime les récits de Jules Verne et tente de coller à un style fin XIXème dans son écriture. Mais je suis personnellement passée à côté. J'ai trouvé que cela desservait un peu la nouvelle si on n'apprécie peu l'exercice somme toute impressionnant.

Les pies voleuses, Catherine Loiseau

Résumé : L'inspecteur Alceste Barnier se voit confier une enquête sur une série de vols auprès de riches personnalités. Au fil de son investigation, il va comprendre que les victimes sont ciblées par un gang qu'il baptisera les pies voleuses, aux revendications politiques. La chasse à la pie va commencer, sous les flash des journalistes toujours présents au mauvais moment...

Mon avis : Une nouvelle policière façon roman-feuilleton dans le pur style de Catherine Loiseau. On y croise une comtesse aussi belle que stupide, un inspecteur amateur de belles femmes, un adjoint timide mais efficace et surtout un gang de voleurs aidés d'inventions dignes de Léonard de Vinci. Tout s'enchaîne assez vite du fait de format nouvelle mais cela n'empêche pas l'inattendu et les rebondissements. Les Pies sont des robins des bois steampunk, ajoutant une dimension politique à leurs vols et les mettant en scène pour s'attirer la sympathie du petit peuple. Une jolie enquête mouvementée dont l'inspecteur Barnier ne sortira pas indemne à coup sûr !

Maudite lumière, Noémie Lemos

Résumé : Armand Ferrand, jeune ingénieur diplômé, vient inspecter une usine de féélectricité à la demande de son propriétaire afin d'en améliorer le rendement. D'abord enthousiaste, il prend vite conscience des conditions déplorables dans lesquelles les ouvrières travaillent. Une découverte scientifique très importante va l'amener à réaliser des choix difficiles qui ne sera pas du goût de tout le monde.

Mon avis : Dans cet univers où l'électricité est réalisée grâce à la magie des fées, les ouvrières trient sans relâche de minuscules fées afin d'apporter la précieuse énergie à tous. Affublées de lunettes, dans une pénombre totale, le labeur est dur et ce n'est qu'une partie des maux dont souffrent ces femmes. L'arrivée de l'ingénieur va bouleverser la donne, même si cela ne sera pas entièrement positif. J'ai beaucoup apprécié l'univers déployé ainsi que les questions sous-jacentes de cette nouvelles. Dans cette histoire, Noémie Lemos interroge la productivité au détriment du bien-être des employés, dans un univers profondément sexiste et méprisant envers les petites gens et les femmes surtout. Les patrons de cette usine font preuve d'hypocrisie en embauchant des anciennes prostituées pour faire acte de charité mais en profitent largement. le traitement des fées est inhumain. La méthode scientifique qu'utilise Armand se heurte aux mêmes préjugés sexistes de ses confrères que dans les autres domaines de ce siècle de "Progrès". La mésalliance entre les nantis et le bas-peuple n'est pas non plus tolérée. L'intrigue nous emporte de plus en plus vers l'horreur et la réalité des choses à travers les yeux naïfs d'Armand. Même son ami médecin s'avère plus ou moins fiable, poussé par une curiosité scientifique morbide et l'appât du gain plus que par la volonté de soigner. On ressort grandi de cette nouvelle qui invite à réfléchir sur de meilleures conditions de travail et vers une grève inéluctable.

En conclusion : Mécanique et lutte des classes est un recueil de nouvelles équilibré qui nous interroge sur le capitalisme, la main d'oeuvre, les petites gens et surtout les automates dans un monde dirigé soit par un patronat sexiste, soit par des ouvriers mécanisés. Une belle manière de parler de notre passé ou de notre présent par le biais de l'uchronie. Je vous recommande chaudement de découvrir ce recueil pour goûter un peu au steampunk, surtout si vous préférez les lectures courtes.
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