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Critique de MissSherlock


Jack l'Éventreur me fascine. J'ai vu pas mal de documentaires sur le sujet et je me suis décidée à lire l'enquête de Sophie Herfort après avoir lu de très nombreuses critiques élogieuses sur son travail. Comme quoi, il faudra que je me méfie des éloges à l'avenir.

Sincèrement, il y avait longtemps qu'un livre ne m'avait pas autant agacée tant la théorie développée frise le ridicule.
Et c'est bien dommage car la première partie était ultra-prometteuse. Sophie Herfort part sur les traces de Jack L'Éventreur et nous emmène avec elle. Avec minutie, patience et sens du rythme, elle retrace la destinée macabre des cinq malheureuses victimes du tueur. L'emploi du temps est détaillé minute par minute. L'auteur a même eu accès aux rapports des médecins légistes qu'elle retranscrit dans son ouvrage (petits coeurs s'abstenir).
On est immergé dans l'histoire comme si on y était : bravo !

Là où ça se corse, c'est lorsque l'auteur expose sa théorie ou plutôt sa vérité car elle ne fait pas de Melville Macnaghten* un suspect mais elle l'accuse formellement des meurtres. C'est choquant de l'accuser avec autant de certitude car il est impossible de prouver quoi que ce soit plus de cent ans après les faits. Qu'elle en fasse un suspect solide, je veux bien mais là c'est manquer d'honnêteté intellectuelle.
Surtout que sa suspicion se fonde essentiellement sur des coïncidences, des aspects psychologiques invérifiables, des propos ambigus.

La majorité de l'enquête repose sur les lettres envoyées à Scotland Yard et signées Jack L'Éventreur. C'est bien embêtant quand on sait que les graphologues estiment que toutes les lettres n'ont pas été écrites de la même main. Sans compter que n'importe qui a pu écrire ces lettres : un journaliste voulant augmenter les ventes de son canard, un anarchiste ou un mauvais plaisantin. Pas forcément le tueur qui ne savait peut-être même pas écrire.

Bref, ça démarre mal. La suite n'est pas mieux. L'auteur part du principe que Macnaghten, et donc l'Éventreur, était schizophrène ce qui est totalement impossible. le tueur n'aurait pas pu être aussi précis, méthodique et instaurer un mode opératoire s'il agissait en pleine crise. L'Éventreur était un psychopathe ou un pervers et je suis persuadée que s'il a cessé de tuer c'est que : soit il est mort, soit il a été enfermé pour d'autres crimes ou à cause de sa folie, soit il a quitté l'Angleterre.

Il n'a certainement pas cessé de tuer parce que le préfet Warren a démissionné. Ah oui ! parce que j'ai oublié de préciser le meilleur : si Macnaghten a trucidé cinq prostituées c'est parce qu'il devait obtenir un poste prestigieux au Yard mais que le Préfet a mis son veto et qu'il n'a pas eu le job ! Si vous êtes DRH, méfiez-vous des candidats que vous recalez, on ne sait jamais. Cet homme respectable aurait pété une pile et massacré cinq innocentes pour un job et esprit de vengeance.

Bien sûr pour que ça tienne un peu la route, l'auteur fait tout pour faire passer Macnaghten pour le dernier des salauds. Chaque mot qu'il écrit dans ses Mémoires le ramène à L'Éventreur et même ses amitiés font de lui un tueur sans pitié. le pauvre bougre a eu le culot d'être ami avec l'acteur qui jouait Docteur Jekyll et Mister Hyde au théâtre, ouh là là ! mais c'est affreux, c'est lui le tueur ! Je me bidonne.

Toute l'enquête repose sur des coïncidences légères et qui, à la longue, m'ont donnée envie de me faire l'avocat du suspect.
En vrac, il écrit jack au lieu de jackals (chacals) dans ses Mémoires donc c'est lui Jack L'Éventreur ; il a reçu des coups à la tête et les tueurs en série ont tous reçu des coups à la tête (ah bon ?) donc c'est lui le tueur (moi aussi j'ai reçu un violent coup sur la tête quand j'étais enfant, je commence à flipper) ; il chassait quand il était en Inde et c'est forcément un chasseur le tueur car seul un chasseur peut dépecer un cadavre quand il fait noir (vraiment ?) ; dans la chambre de la dernière victime, il y avait un M sanglant sur le mur, M comme Macnaghten (et pas M comme Murder) ; etc.
Je pourrais écrire des pages sur le sujet tant il y a à dire sur ces « preuves irréfutables ».

Je pense que l'auteur s'est laissé dépasser par sa passion et, peut-être, par son ego. Un peu de distance n'aurait pas nui. Cela lui aurait permis de constater que de simples conjectures ne sont pas des preuves accablantes. Et si au moins elle présentait ne serait-ce qu'un élément à décharge ou si elle émettait des réserves sur l'une de ses preuves, sa démonstration aurait eu un peu plus de valeur.

J'ajoute que le style de Sophie Herfort n'aide pas non plus à conserver son calme pendant la lecture. Je passe sur les fautes de grammaire et de conjugaison (non en réalité je ne passe pas du tout surtout que l'auteur est prof de français) mais est-il nécessaire de répéter les mêmes choses jusqu'à plus soif ? Madame Herfort pense-t-elle que tous ses lecteurs parlent baleine, s'appellent Dory et qu'il faut leur répéter encore et encore les mêmes infos ? Ou s'imagine-t-elle que répétition vaut démonstration ?
Et, est-il besoin de terminer la moitié des phrases par un point d'exclamation et l'autre moitié par des points de suspension ?

Le titre était accrocheur, le contenu beaucoup moins hormis la première partie. Je suis curieuse à présent de lire le bouquin de Patricia Cornwell qui semble être encore plus farfelu que celui-ci. Je sens que je ne vais pas m'ennuyer.



* Il n'y a pas de spoile de ma part à dévoiler le nom car il est indiqué dans la table des matières en début du livre et Sophie Herfort se plaît à le donner dans toutes ses interviews.

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