Dehors, brouillard, si glacial que les mots me manquent pour le dire- Sur l’étang, nage une pellicule de glace. Les oiseaux se réveillent ; des bruits. Sur le petit pont, mes pas sonnent en creux….. La tempête, la neige, la pluie font aussi voltiger des feuilles qui viennent se coller à moi, jusqu’à me recouvrir totalement. Partir. Aller de l’avant.
Par la fenêtre, j'ai vu un corbeau se poser sur le toit d'en face. La tête dans les épaules, il ne bougeait pas, sous la pluie. Longtemps après, il était encore là, inerte, grelottant, solitaire et calme, plongé dans ses pensées de corbeau. Alors, un sentiment de fraternité est monté en moi et la solitude a envahi mon coeur.
Je vais me laisser porter par la tempête tout autour de la station jusqu'à ce que des ailes me poussent. Cette nuit, lorsque je m'introduirai à nouveau dans une maison, je serai un roi dans son château fort. Un gros réveil, une fois remonté, carillonne la fin des fins. Dehors, le vent ébouriffe la forêt. Ce matin, noyée, la nuit a été rejetée par des vagues froides et grises.
Ce que marcher peut faire mal.
Dehors, violente chute de neige. Ai longuement pénétré du regard les flocons qui tombaient. J'y ai vu une ribambelle de bonnes sœurs et de collégiens s'effleurant aux épaules et aux hanches, incarnation ostensible de l'ouverture d'esprit des religieuses de notre temps. Cette gaité et ce libertinage paraissaient terriblement voulus et avaient un relent de tartufferie.
Arrivé aux Grès, ébranlé de la tête aux pieds, je commandais un café au lait. Deux motards, vêtus de combinaisons de caoutchouc qui leur donnaient des airs de plongeurs sous-marins, ont également cherché refuge. Marcher... ne marche plus.
À midi, Dommartin-le-France. J’ai mangé un peu. Le pays est ennuyeux, vallonné, nu, champs labourés et mouillés. Les sillons retiennent une eau froide, et à quelques distance, tout est noyé dans les nuages imbibés d’eau. Ce n’est pas une vraie pluie, une bruine douce seulement. Les villages sont loin les uns des autres. Calme, rarement une voiture. Ma marche... marche.