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Critique de Sachenka


Hermann Hesse vécut une expérience difficile dans sa jeunesse : peu à l'aise avec les règles strictes et les traditions vieillotes, il décida de s'enfuir du séminaire évangélique où ses parents l'avaient inscrit. C'est en quelque sorte cette expérience qui nous livre ici, dans L'ornière. Avec certaines libertés artistiques, bien entendu. Ce roman est une des toutes premières oeuvres du grand auteur nobelisé, mais déjà on peu y reconnaître les caractéristiques qui feront sa renommée.

À la fin du XIXe siècle, en plein pays souabe, le jeune Hans Giebenrath vit sous l'autorité sévère de son père. C'est une âme sensible mais doué aussi d'intelligence. Et cette intelligence enthousiasme son maitre à l'école secondaire, tellement qu'il désire lui faire passer l'examen d'État, qui peut lui assurer une éducation gratuite dans un séminaire renommé, Maulbronn. le jeune Hans le réussira haut la main, obtenant la deuxième place. Ce qui devait être une grande joie devient vite un fardeau. Pendant ses vacances, son professeur, le recteur de son école et même le pasteur le coercent à suivre des cours particuliers afin de briller et de faire honneur à son village. Au revoir les promenades en forêt, la pêche, le bonheur. Bonjour les longues et éreintantes heures d'études. L'automne arrivé, Hans Giebenrath fait son entrée à Maulbronn. Et il épate effectivement ses nouveaux professeurs. Mais sa nature sensible commence à prendre le dessus : il aime bien rêvasser, s'extasier devant la nature. La mort prématurée d'un de ses camarades (noyé dans un étang) et l'influence néfaste d'un autre (fugueur, qui fut éventuellement renvoyé) auront un impact marquée sur lui, tellement que son caractère devenu instable le mènera à une névrose et il devra récupérer chez lui. Mais ce n'est pas la fin de ses soucisL l'adolescence et un amour trouble viendront l'achever.

En tant que lecteur, on ne peut que s'apitoyer sur le sort du pauvre Hans Giebenrath. Et la magnifique plume de Hesse y est pour beaucoup. Il sait s'y prendre pour faire comprendre l'enfance et ses tourments sans tomber dans le mélodramatique. Des émotions, oui, mais avec sobriété. de plus, il sait y enjoindre une touche de romantisme tout à fait appropriée : l'évocation de la nature (tant à Maulbronn que dans son village natal de Souabe), la sensibilité du garçon, l'exaltation de ses sentiments pour Emma… Les rares fois où Hans a fait preuve de caractère, c'était d'avantage dû à une mauvaise influence qu'à un réel fond de rébellion, contrairement à l'auteur.

À cet égard, L'ornière, s'il n'est pas vraiment autobiographique, elle est partiellement inspirée par la vie de l'auteur. N'empêche, avec ce roman qu'on pourrait qualifier de roman d'apprentissage s'il se terminait surune note plus positive, on dirait que l'auteur règle ses comptes. Dans tous les cas, il semble dénoncer les revers d'un système d'éducation qui l'a déçu. Bref, L'ornière, c'est la vie manquée d'un garçon, écrasé par les attentes de son père et par celles de maitres aux méthodes rigides et conformistes, plus intéressés par le savoir froid qu'ils tentaient d'inculquer que par le développement des enfants placés sous leur tutelle. Pour Hesse, le séminaire devient une sorte d'usine, où on apprend aux enfants à ânnoner, à répéter par coeur les leçons apprises mais pas à penser par eux-mêmes, où il n'y a pas de place pour l'initiative ni pour la créativité. En d'autres mots, tout le contraire des institutions pédagogiques modernes.
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