AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Dauthie




Quitter l'hiver n'est pas un polar, encore moins un thriller et pourtant, j'en ai tourné les pages comme si c'en était un.

Katia, jeune serveuse d'un restaurant parisien, est victime d'une tentative de viol par son patron. Elle évite le pire, assomme son agresseur et prend la fuite non sans avoir piqué quelques centaines d'euros dans la caisse de l'établissement. Un réflexe, pourrait-on dire, parce que son destin de fugitive est désormais scellé et tout est bon à prendre pour s'en sortir. En parallèle, Madeleine, auréolée d'une brillante carrière d'animatrice radio, voit se profiler à l'horizon la silhouette menaçante de la camarde. Cancer. Elle domine tant bien que mal les douleurs postopératoires et chimiothérapiques en fumant des bédos et décide de regagner son île natale, en Bretagne. Katia fait du stop. Madeleine embarque Katia. Et c'est parti pour une aventure au cours de laquelle les deux femmes vont se jauger, se découvrir et finalement se réunir dans ce que je pourrais qualifier de "chute horizontale", comme dirait Cocteau, d'autres penseront à un road movie, sauf qu'ici on sait où on va. Parmi les personnages qui viendront se greffer au récit, je citerai notamment Marcus, chanteur tourmenté qui s'échappe régulièrement sur l'île pour se réfugier dans l'alcool, à l'instar de bon nombre d'artistes que la notoriété répugne autant que l'insuccès, suprême contradiction.

Au fil du voyage, on découvrira d'autres protagonistes non moins attachants ou mystérieux, souvent fragiles, les liens se tissent, la vérité se fait jour.

Pourquoi ai-je parcouru ce livre comme un polar ? Eh bien parce qu'il y a la notion de danger, d'événement inattendu qui peut bouleverser le projet des deux femmes. Katia a abandonné son violeur inconscient sur le sol du local où a eu lieu l'agression. Est-elle une meurtrière ? Ou bien a-t-il survécu ? Si oui, il a peut-être alerté les autorités, d'autant qu'un vol a été commis… de son côté, Madeleine, très diminuée, sera-t-elle suffisamment forte pour accomplir son pèlerinage à rebours ? Si c'est le cas, comment se passeront les retrouvailles avec les îliens qui connaissent la jeunesse et l'histoire de celle qui est un jour partie pour devenir célèbre ? Tout est possible.

Avec ces incertitudes qui incitent à tourner rapidement les pages, on se surprend néanmoins à goûter les passages plus contemplatifs, offrant des moments bienvenus et intimistes. Bien décrits sont les paysages parcourus, l'atmosphère qui règne sur l'île, en digressions finement ciselées. Et puis il y a la souffrance de Madeleine, son délabrement physique évoqué tout en pudeur, sans tomber dans la pleurnicherie. Et il y a aussi, j'allais oublier… de l'amour. Bien que je ne sois pas très porté sur la littérature du genre (Marc Lévy ne fait pas partie de ma culture livresque, personne n'est parfait), j'avoue avoir été troublé par une scène de coup de foudre magistralement évoquée.

D'aucuns diront que l'écriture est fluide mais je n'aime pas trop ce qualificatif. En matière de littérature, la fluidité est devenue synonyme de simplisme, alors que le style de l'auteure, pour fluide soit-il, offre une narration parsemée d'embâcles habilement contournés, donnant au lecteur l'impression qu'il descend une rivière changeante, dans une espèce de faux rythme. On n'est pas sur le canal du Nord à bord de la péniche de l'homme du Picardie, si vous voyez ce que je veux dire.

Je vous invite donc à quitter l'hiver avec Sylvette, c'est aux éditions Henry des Abbayes, c'est une belle histoire à laquelle on croit, bien qu'elle soit suffisamment invraisemblable… pour faire un bon livre. Après tout, ce que l'on attend d'un roman, n'est-ce pas de tordre le cou au réel ?
Commenter  J’apprécie          00



Acheter ce livre sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten




{* *}