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Critique de LeScribouillard


Wolfgang Hohlbein est un auteur allemand prolifique. du genre pire que moi. Sauf que lui, au moins, il publie. Il est un des écrivains de SFFF les mieux vendus de son pays, et certains se plaindront sans doute que sa productivité y est parfois pour davantage que sa qualité littéraire (ne vous méprenez pas, Barbie und das Fitness-Studio m'a quand même l'air d'être un chef-d'oeuvre de la littérature postmoderne). Son cycle principal, La chronique des Immortels, fait pas moins de quinze tomes, et même une bête de traduction à la chaîne telle que L'Atalante (Honor Harrington, le Disque-monde…) a fini par jeter l'éponge au bout du huitième. Ce que je ne savais tout naturellement pas en bon cuistre que j'étais quand j'ai emprunté le tome 1 à ma médiathèque préférée. Qu'importe ! J'en ai quand même pour un moment de lecture avec plus de sept volumes…

Critique no spoil

Andrej Delãny croyait avoir tout vu. Il a été banni des siens pour un crime qu'il n'a pas commis, dû errer des années dans un monde violent et impitoyable, vu mourir sa femme et sa fille et n'a reçu de réconfort que d'un maître d'armes étrangement généreux. Quand il revient sur ses terres, c'est sans s'avouer l'espoir d'y mourir. Mais son calvaire ne fait que commencer…
À peine franchit-il les portes du village de Borsa qu'il tombe sur un charnier. Seul un enfant, Frederic, a survécu ; étrangement, il porte le même nom que lui. L'Inquisition est responsable de ces dizaines de meurtres, tortures et déportations. Dans une terre qui n'est pas sous la juridiction de Rome ? Delãny décide d'enquêter, suivi par l'étrange garçon. L'occasion de donner un nouveau sens à son existence. Voire de retrouver l'espoir…
Au bord du gouffre est un début prometteur ; mais est-ce pour autant un sans-faute ? Commençons par souligner des points qui sembleront sans doute superficiels : il s'agit d'un livre court (moins de 300 pages) qui ne s'appesantit pas en détails comme on tendance à le faire les mastodontes de 500-600 pages qui sortent de nos jours, et ce avec une très belle couverture rappelant les heures les plus gothiques du dungeon-synth. Mais le principal atout reste ses deux héros : Andrej est un combattant « à la Thorgal », un homme extrêmement doué à l'épée mais restant humble et tentant comme il peut d'éviter les conflits ; une figure paternelle forte et mystérieuse, mais avant tout porteuse de valeurs de paix et de stabilité. Frederic, lui, est un enfant qui débute tout juste dans la vie : impulsif, manichéen, il ne cherche qu'à se venger et peu importent les moyens. Andrej va lui apporter un certain équilibre, voire raviver en lui un soupçon d'innocence.
Pourtant, les autres personnages restent moins dignes d'intérêt ; ça et le fait que le style use de temps à autres de quelques poncifs, mais c'est moins grave, après tout c'est du divertissemââânt populaîîîre. On a notamment une nana qu'on sait pas ce qu'elle tourne à accompagner son frangin dans des terres aussi hostiles et éloignées, et qui séduit le héros en mode gros coup de foudre des familles. Les méchants sont pour la plupart des guerriers monolithiques, ou bien empressés de faire leur devoir, ou bien de courir après la gloire, malgré un seigneur pour le moins énigmatique qui tire son épingle du jeu.
Il va d'ailleurs falloir faire un petit point taxidermi… pardon, taxinomique (encore qu'avec certaines scènes de ce roman…). L'Atalante le présente comme de la « fantasy noire », traduction possible de dark fantasy, mais on est clairement sur de la swords and sorcery : héros solitaires, quête, moins de tendance à orienter le récit vers la fantasy militaire ou politique. Si quelques scènes hardcore restent présentes de-ci de-là, ça ne gêne en rien le classement, dans la mesure où l'on considère la S&S comme une variante plus tourmentée de l'heroic fantasy.
C'est d'ailleurs au niveau de la classification que vient ma plus grosse frustration venant du livre : je m'attendais à une fantasy réellement dépaysante en ceci qu'elle se déroule en Europe de l'Est. Mais fin du Moyen Âge et uniformisation de l'Europe oblige peut-être, il n'y a au final rien de bien différent des meds-fans traditionnels, si ce n'est quelques détails et le fait que l'on devine dès le début du livre l'apparition d'une créature… vivant dans une certaine région de la Roumanie. Et c'est sans doute son traitement qui m'a convaincu de lire la suite.

Critique spoil

Quand Wolfgang Hohlbein se réapproprie la figure du vampire, il décide de le changer en une toute autre bestiole. Pourtant, rien à voir avec les sacs à botox de Stéphanie Meyer ! Si ses nosferatus peuvent vivre en plein jour (au point d'ignorer parfois qu'ils en sont), ils n'en demeurent pas moins fascinants : guérissant très vite, aux sens très affûtés, quasiment immortels, ils doivent se nourrir du sang pour augmenter leurs pouvoirs. Mais le plus gros changement est qu'ils ne se nourrissent pas du sang des humains : ils se nourrissent du sang des autres vampires.
Un changement de paradigme très simple et pourtant lourd de conséquences. Pour une espèce vampirique normale, il y aurait une expansion permanente de l'espèce (hop, je te mords et tu mords ton voisin et personne meurt, na na nère), tandis que là les vampires sont considérablement freinés et condamnés au cannibalisme voire à long terme à l'extinction de leur espèce. L'auteur parvient à rendre cela cohérent, tout en restant original. Il faut dire qu'il s'est bien inspiré : en effet, l'idée d'immortels paradoxalement contraints à s'entretuer rappelle fortement le film Highlander… sans les parkings souterrains.
À mesure qu'on avance dans le livre, les twists s'enchaînent jusqu'à un dernier tiers haletant… et une fin ouverte qui n'augure que de l'épique !

Conclusion

Bref, je critiquerai très probablement la suite de la chronique des Immortels, qui s'annonce sinon une lecture exceptionnelle au moins un moment agréable. N'hésitez pas à vous pencher dessus si jamais la fantasy germanique vous tente, parce qu'après tout, c'est pour votre culture…
Lien : https://cestpourmaculture.wo..
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