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Critique de Comedenanteuil



Un roman est une porte sur une réalité imaginée, retravaillée, réinventée. La carte et le territoire pousse l'exercice jusqu'à son paroxysme. L'auteur s'y introduit en effet en personnage secondaire mais central du récit. Il y met en scène sa propre mort, ses fluides corporels répandus sur le sol à la façon d'un Pollock pour assouvir le désir plein d'hubris et dérisoire d'un amateur d'art. Ce n'est pas la moindre des pirouettes de ce livre dans lequel on se jette, dont on se délecte et qui laisse songeur une fois achevé.
Michel Houellebeccq y retrace la vie d'un artiste, Jed Martin, dont le lecteur fait la connaissance par le truchement de son chauffe-eau. Ce motif du chauffe-eau reviendra de façon récurrente, comme un élément indispensable de la banalité de la vie contemporaine, sans que l'on sache pourtant si ce détail a une quelconque importance. Entre ces survenances incongrues de petits riens, l'auteur tisse avec souffle une vie dont l'existence sera dédiée à la description du monde tel qu'il est, ceci par la photographie, la peinture, puis la vidéo.
Il est surprenant comme, Houellebecq arrive à sublimer les rares points de jonction avec la société de l'existence monacale d'un individu autocentré et quasi-asocial. Les déchirements douloureux de sa solitude permettent de plonger avec d'autant plus de force . L'histoire d'amour avec Olga, la conversation avec son père mourant, la relation du personnage avec l'auteur, puis la résolution du crime constituent les points d'orgue d'un récit dont les fils s'étendent telle une toile d'araignée.
Comme à son habitude, l'auteur tire profit de sa marionnette centrale pour peindre la société contemporaine avec acuité. Il met ses personnages en situation de façon à ce qu'ils soient les critiques de l'absurdité du marché de l'art, de l'influence néfaste de le Corbusier sur l'urbanisme contemporain, de la société du spectacle qui se donne en spectacle. L'élite financière et économique y est dépeinte comme un ensemble de marionnettistes, impactant de quelques doigts seulementla vie des petits pions.
Le roman est traversé de part en part par un inconfort. La douleur avec laquelle Jed Martin se promène dans sa vie apparait un miroir de celle de l'écrivain. Ce dernier signifie la fin de son art. Il veut se taire à jamais. Les efforts qu'il produit ne font que pousser le lecteur à s'y attacher davantage . Bis. Bis. Bis.
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