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Critique de RomansNoirsEtPlus


Si vous aimez les romans noirs qui sortent des sentiers battus , couplés avec des personnages hors-normes et une écriture au style implacable, ne passez pas à côté de ce livre de l'auteur suisse qui a démontré, en seulement quelques romans, toute la qualité de ses fictions romanesques comme la maîtrise du verbe.
Si le pitch de base de ce livre n'a rien d'extraordinaire, ce sont les personnages, qu'ils jouent les premiers ou les seconds rôles, qui le sont.
Prenez Pierre Castan , qui depuis que sa petite fille a disparu il y a six mois sur une aire d'autoroute, a perdu le sens de la raison en squattant 24 heures sur 24 les différentes aires qui bordent l'autoroute, calfeutré dans sa voiture, à l'affût du moindre renseignement qui le mettrait sur la piste de son ravisseur, persuadé qu'il n'est pas loin et qu'il recommencera. Sa femme, elle, a pris le partie de martyriser inlassablement son corps et plus particulièrement l'endroit d'où sa fille est sortie, s'autoflagellant de ce manque, de cette absence insoutenable, mais espérant chaque jour que Pierre puisse se rapprocher du bourreau de sa progéniture pour remplir sa mission.
Le ravisseur est effectivement tout près qui vient de soustraire à la vigilance de ses parents une nouvelle jeune fille lors du chassé-croisé estival de la mi-août laissant dans le plus grand dénuement psychologique ce couple au bord de la rupture.
La capitaine de gendarmerie Julie Martinez et son binôme le lieutenant Gaspard mènent l'enquête et, avec leur équipe, vont fouiller le moindre recoin de l'aire d'autoroute, récolter le moindre témoignage, qu'il provienne de touristes en goguette ou de salariés du restoroute. La tâche semble complexe d'autant que la capitaine a d'autres idées plus torrides en tête, bien loin de la laideur de ces bâtiments en ciment, des remugles corporels et de l'asphalte chauffée à blanc .
La canicule rend poisseux les corps et échauffe les esprits alors même que le mal rôde et peut prendre des atours bien surprenants.

Joseph Incardona nous offre un roman brut et jouissif circonscrit par des panneaux et des rubans de bitume sur lesquels des voitures tracent leur route au-delà de l'horizon.
Mais ici on est bien dans un (quasi) huis clos glauque et glaçant représenté par cette aire d'autoroute. Un espace comme une micro société qui hante de manière provisoire ou récurrente les lieux. Routiers, touristes, cantonniers ou autres travailleurs des stations service, gérant ou employés de restaurants d'autoroute … prostituées. L'auteur s'attarde sur chacun d'eux comme s'ils faisaient partie d'un grand tout cosmique, témoins muets ou personnages actifs d'un drame annoncé .
Sans langue de bois, le vocabulaire est salé et cru. Il ne cache rien de cet univers où l'on s'arrête mais où on ne s'attarde pas à moins qu'un atroce événement ne vous y raccroche. Pierre est l'un de ceux-là, témoin de ce microcosme en mouvement qu'il guette , à l'affût du moindre signe, de la moindre odeur qui le rapproche du ravisseur de sa fille . Il ausculte cette humanité comme il examinait les cadavres à l'époque où, légiste, il agissait méticuleusement à la recherche d'un élément probant permettant de mettre les enquêteurs sur une piste.
Comme dans ces autres romans, on retrouve ici un fonds de satire social qui fait mouche avec cette belle brochette de personnages qui semble avoir été apportée comme sur un plateau. Des personnages jamais caricaturaux mais au contraire extrêmement saisissants. Un roman qui respire l'authenticité aussi triste et répugnante soit-elle, l'une des marque de fabrique incontestable de l'auteur suisse.






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