La promesse de l'Est

Le parcage, le marquage et la réduction au travail constituèrent un traitement animalisant qui rendait, pour les nazis, équivalent à une pratique d’abattage l’envoi de ces communautés dans des installations de gazage à Bełżec et à Sobibor à partir de mars 1942.

Les Juifs de la région y furent d’abord soumis à un traitement que l’on peut analyser comme une procédure rituelle de domestication symbolique ayant pour effet de les ravaler, aux yeux des nazis, à une masse d’individus équivalente à un troupeau dont seules comptaient les capacités de travail et de reproduction

Ces échecs incessants et sanglants ont toujours été surmontés par la mise en place d’un plan plus ample, plus ambitieux, plus meurtrier, véritable illustration de ce que feu Hans Mommsen avait dénommé la radicalisation cumulatrice.

Échec des plans à court terme entre 1939 et janvier 1941, échec du plan Madagascar à l’été 1940, échec des projets de construction d’Odilo Globocnik et de ceux de Hans Kammler et du WVHA ; échec, enfin, des immenses politiques de famine ourdies par la Wehrmacht, la SS et les dirigeants politiques nazis. Le seul plan presque mené à bien étant tragiquement celui d’extermination exhaustive de la Judaïté européenne, devenu un préalable à l’advention impériale

La révolution nazie fut inexorablement une affaire de jeunes êtres, et les quinquagénaires font déjà parfois un peu figure de vieillards dans ce monde, face à des quadragénaires investis d’immenses responsabilités, et à ces jeunes à peine sortis de l’adolescence qui constituent la piétaille de l’armée de l’espérance nordique.

En premier lieu, c’est bien l’ampleur du projet nazi qui frappe l’observateur. De 1939 à 1943, il a épousé les contours d’une expansion impériale gigantesque et, au mitan de l’euphorie SS, c’était bien un empire germanique allant de la Seine à l’Oural, du Cercle polaire à la mer Noire, et dont le cours des siècles aurait vu se déployer une population de 600 millions de Nordiques, qui constituait l’horizon des dignitaires SS. De l’Ingermanland baltique au Gottengau de la mer Noire, de la mer d’Azov aux campagnes de Posen, les aménageurs nazis rêvaient une Europe immense.

Au moment où seules comptaient désormais les productions d’importance stratégique dans l’effort de guerre, les instances économiques SS n’avaient pas réussi à mettre la main sur une quelconque fabrique d’armement ou de munitions. Les industries SS étaient uniquement capables d’honorer des commandes d’assiettes creuses, de bols et de verres

Ces hommes savent élaborer des procédures rationnelles et efficaces en concentrant et en centralisant par exemple des formalités administratives d’expulsion, de confiscation et de retrait des documents d’identité en une seule chaîne. Une sorte de taylorisme administratif sur le mode du guichet presque unique

En mai 1942, 80 % des victimes du génocide sont encore en vie. Un an plus tard, la proportion s’est inversée

Le 20 janvier 1942 se tient la conférence de Wannsee, qui avalise un plan paneuropéen de déportation des Juifs à des fins homicides, informe et coordonne l’ensemble des ministères, administrations et agences gouvernementales concernés par le processus, le tout sous l’égide de Heydrich et d’Eichmann