AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de TiphaineRoche


Si vous n'avez pas froid aux yeux et que vous aimez frissonner de peur bien à l'abri dans votre canapé, initiez-vous au kowaï - le manga horrifique - avec Junji Itō. Considéré comme l'un des maîtres de l'horreur à la japonaise, il est influencé à la fois par le folklore japonais, Kazuo Umezu - le père du manga d'horreur - et les romans de Lovecraft et Stephen King.

La première des neuf nouvelles sélectionnée par l'auteur, le vieux vinyle, constitue une introduction à pas feutrés dans l'univers du mangaka qui rappelle la légende urbaine de Ring. Une manière peut-être de ménager le lecteur qui, dès les nouvelles suivantes, va vivre des événements réellement monstrueux se substituant graduellement aux sentiments d'angoisse qui émanent des personnages.

A travers ses courtes nouvelles, Junji Itō excelle en effet dans l'art d'instiller l'angoisse dans le quotidien le plus banal pour basculer progressivement dans l'horreur la plus pure. Plutôt que le gore, c'est la terreur psychologique qui domine ici avec une plongée dans le genre body horror parsemé de corps difformes, en décomposition, en mutation, ou même déjà passés dans le monde des morts à l'état fantomatique. Derrière ces représentations corporelles, ce sont les peurs primaires face à la maladie et à la mort qui s'expriment et peuvent surgir soudainement, sans que les humains ne puissent avoir le moindre contrôle. Que devient l'enveloppe charnelle, une fois passée de l'autre côté ? Quel message les morts veulent-ils nous faire passer ? Aucune explication n'est donnée aux phénomènes étranges qui surviennent.

Les apparitions inattendues de fantômes et l'effroi qu'elles suscitent sur les vivants constituent l'un des motifs récurrents au coeur des récits. Cette thématique remontant aux croyances populaires de l'ère Edo est reprise par la J-horror, un mouvement dans lequel s'inscrit Junji Itō dès la fin des années 1980. le genre sera propulsé quelques années plus tard au cinéma avec les films Ring (1998) ou Dark water (2002) de Hideo Nakata.

Dans ce domaine, le mangaka impressionne par sa maîtrise scénaristique et son rythme narratif caractéristique où il n'y a pas vraiment de fin, les nouvelles s'arrêtant en pleine action, accentuant l'aspect abrupt du récit. Si l'impression de malaise est omniprésente, l'auteur y ajoute une poésie macabre démontrant la richesse de son style graphique.

Multi-récompensé pour son travail, Junji Itō vient de remporter une nouvelle fois un prix Eisner au Comic-Con 2022. Son oeuvre a également inspiré de nombreux artistes qui ont adapté ses mangas à travers des animes, des films en prises de vue réelle et même un jeu vidéo rétro, World of horror, conçu comme un double hommage au mangaka et à Lovecraft.
Lien : https://cinebulles.blogspot...
Commenter  J’apprécie          00







{* *}