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Critique de Ys


Ys
26 octobre 2016
Le plus redoutable des poisons est celui qui sait se rendre indispensable. Celui qui apaise, réconforte, exalte, celui qui berce d'illusions, offre le ciel puis rejette en enfer pour qu'on l'implore à nouveau.
Ce week-end, Don ne partira pas à la campagne avec son frère. Une dérobade, un premier verre, et le cycle fatal reprend. le second verre, le troisième, tous les autres, le sentiment d'euphorie, de puissance, de lucidité splendide, splendide mais cruelle, si cruelle qu'il faut bientôt la noyer, l'assommer, retourner au néant. Et le réveil terrible, le manque accroché dans chaque fibre de corps, les souvenirs perdus, le cerveau qui déraille, l'argent qui vient à manquer, la terreur atroce du sevrage, les expédients pathétiques pour se procurer un verre, un simple verre, de quoi se remettre debout... et recommencer. Don sait trè bien ce qui l'attend - à ce stade, il faut atteindre le fond du fond pour espérer remonter. Mais ce fond-là existe-t-il seulement, ou ne s'agit-il pas de tomber encore et toujours plus bas ?

Quelques éléments biographiques ne font que confirmer ce que l'on sent, ce que l'on sait déjà à la lecture : c'est dans sa propre expérience, dans ses propres démons que Charles Jackson est allé puiser cette chronique de l'addiction, de ses splendeurs fausses et de ses désastres sordides. C'est intime et vibrant, implacablement lucide et sans complaisance, même dans le plus pathétique. le sujet s'épingle lui-même tel un cafard sur la planche du naturaliste, mais foin des analyses cliniques et froides, c'est la poésie qui l'emporte alors dans une prose torrentielle, hallucinée, puissante. de détours en contours, une personnalité complexe, pitoyable se dessine, des traumatismes de l'enfance et de l'adolescence aux échecs sans fin de l'âge adulte, un écrivain raté amoureux fou de la littérature mais incapable de créer, un esprit brillant mais veule, tombé dans le cycle sans fin de l'autodestruction, un homme pour qui la chance même est malchance, ou condamnation.
C'est puissant comme un coup de poing, fascinant comme un mauvais rêve.

Un grand merci aux éditions Belfond pour la réédition de ce très beau roman, qui rendit son auteur célèbre avant d'être (en France du moins ?) assez injustement oublié.
Lien : http://ys-melmoth.livejourna..
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