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Critique de Pasoa


Publié en 1917, composé de nombreux poèmes écrits pour la plupart entre 1903 et 1910, le Cornet à dés est le recueil qui a rendu célèbre Max Jacob.

Écrit à une époque où le dadaïsme et le surréalisme régnaient sur le milieu littéraire, Max Jacob s'est toujours tenu à l'écart des deux mouvements.
L'écriture automatique, le hasard des mots, l'élan subversif ne l'attiraient que très peu. Son écriture, son style n'en paraissent pas moins assez indéfinissables, d'autant plus qu'il introduit un genre nouveau, celui du poème en prose.

Dans la banalité apparente de récits courts, le poète fait alterner des pensées profondes, des traits d'esprit mais aussi la trivialité et l'étrange. Pour autant, le sens ne semble pas se dérober à la compréhension. C'est cela qui rend sa poésie particulièrement attachante.

« Dans les maisons, les taches des plafonds sont des
symboles de vie des habitants : voici deux ours qui
lisent un journal près du feu. »

Il y a chez Jacob, le souci constant de mettre en évidence la matérialité du langage, de le dépouiller de tout lyrisme. Une mise à distance assumée pour que le texte ne soit pas confiné dans l'émotion seule.
Max Jacob a longtemps défini son recueil comme étant tout aussi aléatoire que le résultat d'un jet de dés. Pourtant, on sent que tout dans son écriture est savamment organisé, maîtrisé. le poète n'estimait pas beaucoup l'idée d'être touché par l'inspiration. Il lui préférait la rigueur du travail.

« C'était aux environs de Lorient, il faisait un soleil
brillant et nous nous promenions, regardant par ces
jours de septembre la mer monter, monter et couvrir
les bois, les paysages, les falaises. Bientôt il ne resta
plus à lutter contre la mer bleue que des méandres
de sentiers sous les arbres et les familles se rappro-
chaient. Il y avait parmi nous un enfant habillé en
costume de marin. Il était triste ; il me prit la main :
« Monsieur, me dit-il, j'ai été à Naples ; savez-vous
qu'à Naples, il y a beaucoup de petites rues ; dans
les rues on peut rester tout seul sans que personne
vous voie : ce n'est pas qu'il y ait beaucoup de monde
à Naples mais il y a tant de petites rues qu'il n'y a
jamais qu'une rue par personne. - Quel mensonge
vous fait encore ce petit, me dit le père, il n'est pas
allé à Naples. - Monsieur, votre fils est un poète. -
C'est bien, mais si c'est un littérateur je lui tordrai
le cou ! » Les méandres des sentiers laissés à sec par
la mer lui avaient fait songer à des rues de Naples. »

Ce que j'ai aimé dans la lecture de Max Jacob, c'est la capacité, la simplicité de l'auteur à rendre compte du pouvoir de l'inconscient et du rêve, sans jamais lâcher le fil ténu de son propos, à lui donner une nature insoupçonnée.
Chez Jacob, la poésie se fait anecdote, allusion, fantaisie, souvenir,… pour dire le mystère de l'existence. Récits insolites où l'étrange devient familier et inversement, où nous saisit l'étonnement de découvrir encore toute la puissance inaltérable de l'imaginaire et du langage.

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