C’était bon de se retrouver chez soi, de longer les vieilles rues bordées de fougères arborescentes, de chênes et de palmiers. La ville était une oasis de verdure presque entièrement dissimulée par des entrelacs de mousse espagnole, d’une densité telle que le soleil n’y perçait jamais.
La seule chose dont on était sûr, c’est que l’homme avait déserté la Terre. Et la Terre, sans lui, était terriblement vide.
Il était facile de parler dur, mais quand les balles claquaient autour de vous, c’était le moment d’agir, et ceux qui parlent bien, souvent n’agissent pas.
« Dieu n’a pas besoin de miracle pour prouver Son existence. »
La peur l’envahit. Pacifique par nature, elle craignait les ours entre toutes les créatures, à cause de leur cruauté et de leur sens de l’organisation. Ils étaient les seuls êtres au monde à vouloir égaler l’agressivité de l’homme.
« Il y a une explication à toute chose. Il suffit de la trouver. »
C’était l’ennui en ce monde. Les êtres ne faisaient que constater l’existence des autres sans se demander vraiment ce qu’ils pensaient.
Le savoir, et le gain du savoir, leur donnent une réelle satisfaction. De temps à autre, ils sont vraiment exaspérants, car pour eux chaque fait nouveau doit être relié à la structure des autres choses, mais plus vite ils apprennent, plus ce processus devient rapide. Un jour, ils seront les égaux de l’homme dans toutes les matières, ils nous surpasseront peut-être.
Dans votre métier, vous devez souvent avoir l’occasion de pénétrer les noirs endroits des cerveaux humains. Vous devriez en savoir assez sur les motifs et le bonheur. Ma propre vie a toujours été trop occupée pour que j’aie le temps de penser à me ranger et à fonder une famille, et jusqu’à des temps très récents, je ne l’ai jamais regretté. Peut-être est-ce les radiations de fuite qui affaiblissent mon cerveau, mais j’en étais venu à penser à ces Weskers, ces poissons en fourrure, comme à des enfants, mes propres enfants, je me sentais responsable envers eux.
Je suppose que je suis ce que vous nommeriez un athée, et la religion révélée n’est pas mon rayon. Et ces indigènes, tout simples, illettrés et à l’âge de pierre qu’ils soient, ont réussi à vivre jusqu’ici sans superstition ni traces de déisme aucun. J’espérais que cela continuerait ainsi.