Quand on passe son temps à travailler avec les mots, on a parfois besoin de récupérer , dans un lieu où le langage ne s'articule plus, où on est réduit à quelques substantifs élémentaires . Mer. Oiseau. Ciel.
On dit que le jour viendra -peut-être même est-il déjà venu- où il n'y aura plus de faune sauvage. C'est-à-dire où il n'y aura plus sur notre planète une seule espèce capable de se reproduire sans se référer à notre bon vouloir ou négocier avec nous. Un jour où notre intervention ou notre restriction seront un facteur de leur droit de survie.
Il y a une phrase à laquelle je pense toujours, chaque fois que j'aperçois un oiseau de proie perché sur un poteau, ou que je regarde planer un faucon crécerelle. Si vous avez vu le faucon, vous pouvez être sûr que le faucon vous a vu.
Quand je veux apprendre quelque chose, j'ai recours aux livres et je me sens curieusement vulnérable quand je n'ai pas de volumes sur lesquels me rabattre, c'est comme si je me tenais moi-même sur une corniche. Je dois tout simplement apprendre à être patiente, apprendre à observer de mes propres yeux.
Les baleines montent et descendent lentement, presque qu'avec paresse ou langueur. Tout le reste brille, mais au milieu des paillettes s'élèvent un épais croissant noir. D'habitude l'œil fait le travail inverse, toujours prêt à repérer une lueur dans l'obscurité. Aujourd'hui nous guettions le soulèvement de la noirceur contre toute cette lumière.