AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de afriqueah


Ce « polar venu de Namibie » parait cocher toutes les cases requises : sur des terres appartenant aux Blancs, le Steinland, un meurtre, Gregor Rodenstein, Allemand qui n'a pas voulu, pour rester dans sa terre d'élection la Namibie, rejoindre le grand Reich comme ses compatriotes, sa veuve éplorée en garde toute la nuit contre les chacals devant le cadavre de son mari, l'enlèvement du fils par les terroristes de service.
Une femme flic, Clemencia, formée en Finlande.
Celle-ci habite dans le quartier pauvre de Windhoek, entassée avec deux cent mille personnes dans un township.
Ce « polar » écrit par un Allemand vivant à Windhoek, prend une intéressante dimension géo-politique lorsque l'on comprend que ces terres « de Namibiens Blancs » sont revendiquées par les Namibiens Noirs, avec l'aide d'une réforme agraire.
Car 70% des terres agricoles sont mises en culture par des Blancs namibiens, qui ne représentent que 7 % de la population.
L'idée, pourtant, d'exproprier ces Blancs pour distribuer aux Noirs les terres cultivables, se heurte non seulement à la volonté de ceux qui refusent d'être chassés de leurs terres, mais aussi à la crainte d'effondrement de la production agricole, vu la non formation et le manque de moyens des futurs occupants, ou encore au possible favoritisme en faveur des Ovambos, vu que les Hereros ont été presque tous exterminés, enfin, à l'impossibilité pour l'État de compenser l'expropriation de personnes vivant là depuis plus d'un siècle.
Redistribuer, ce serait donner un sens à l'indépendance obtenue en 1990, contre le pays colonisateur, en l'occurrence l'Afrique du Sud et son système d'apartheid instauré aussi en Namibie ; mais l'exemple du Zimbabwe, ancienne Rhodésie, au moment de Mugabe, avec les exagérations que l'on sait (Doris Lessing se désolidarise de ce régime d'expropriation sans indemnisation, apportant la famine dans ce grenier à blé qu'était l'Afrique australe auparavant)fait hésiter certains dirigeants namibiens.
Dans ce cadre, Bernhard Jaumann monte un polar, en insistant par exemple sur le rôle restreint de la police namibienne, empêchant le lynchage d'un violeur d'une gamine, ou bien lorsqu'un bar ouvre sans licence et ne peut expliquer d'où viennent les portables vendus à la sauvette. Clementia, de son côté se pose la question de son véritable rôle : être la bonne personne, maintenir l'ordre à tout prix, avoir le sentiment d'être du bon côté ou simplement gravir les échelons ?
Enfin, bien entendu, les victimes ne sont pas celles que l'on croit, un des problèmes soulevés est le droit de se faire enterrer à Steinland quand on y a travaillé toute sa vie, argument contré par le risque d'en revendiquer la possession. Seuls les Rodenstein y ont un cimetière à eux.

Pour conclure, la politique couvre tous les jeux et les compromissions. « Nous savons que nous ne vaincrons pas la pauvreté même en expropriant tous les fermiers blancs, Pour cela, bien d'autres mesures sont nécessaires, et nous les prendrons aussi. Cependant, il se pourrait que nous n'en ayons plus le temps, parce que nos partisans perdent patience, et nous, notre majorité », dit un homme politique cultivant l'art de ne rien dire, alors que son chef assène : «  nous avons le pouvoir d'expulser cette bande d'escrocs blancs du pays, et si cela est nécessaire ou s'ils continuent à nous provoquer de la sorte, nous le ferons sans aucune pitié. »
Commenter  J’apprécie          7433



Ont apprécié cette critique (74)voir plus




{* *}