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Critique de Enderlion


Quelque part, dans un lointain futur.
Au guidon de sa norton, Ny Axxter arpente le mur, vaste étendue verticale du cylindre, une sorte de gigantesque tour de Babel régie par des clans guerriers. Au sommet de cette monumentale architecture, sur le secteur horizontal, règne le plus puissant d'entre eux, le Cruel Amalgame, dont l'ennemi juré, le Pleuple de Dévastation, menace l'hégémonie...
Tandis qu'il est à la recherche d'un scoop destiné à Info-Express, Axxter voit sa chance tourner en sauvant la vie de Lahft, un ange de méthane femelle ; rien que ça !
Dès lors, cette rencontre va l'entraîner dans une succession de mésaventures les plus folles et furieuses. Et le chasseur d'images qui se voyait déjà riche à millions va devenir la proie du clan guerrier le plus redouté : le Peuple de Dévastation.
Pour sauver sa peau, Axxter devra compter sur l'aide précieuse d'alliés pour le moins singuliers et composer avec les différentes organisations peu scrupuleuses du réseau du cylindre.
Mais si la traque menée par le Peuple fera de lui une célébrité, elle le poussera dans ses derniers retranchements. Ny Axxter n'aura en effet d'autre choix que de se rendre à l'intérieur du cylindre, là où règnent les Noyaux Morts...
Et pour couronner le tout, il devra subir les assauts du mégassassin chargé de le tuer ; tout cela, sous le regard halluciné du monde vertical alors en pleine ébullition...

Si résumée ainsi, l'histoire a l'air plutôt alléchante, la lecture du livre révèle hélas quelques failles que je m'en vais approfondir, hum. Avant tout, je dois avouer que j'ai parcouru ce roman avec beaucoup de plaisir même si, dans un premier temps, je n'ai pas reconnu le style précis et percutant de son auteur, K. W. Jeter. Cela m'a un peu rebuté au début, puis les pages tournant, je m'y suis accommodé malgré quelques déconvenues en cours de lecture.

En dépit d'un postulat de départ des plus farfelus, Horizon vertical possède des qualités indéniables, à commencer par des idées de génie éparpillées aux quatre coins du récit, des idées folles et intriguantes qui n'ont de cesse de relancer l'intérêt du lecteur en donnant un petit coup de boost aux pérégrinations de Ny Axxter ; car très souvent le moteur de l'intrigue cahote, ce qui fait la force de l'histoire faisant aussi sa faiblesse.

Le principal problème, c'est le point de vue adopté par l'auteur. Vous ne vivrez l'histoire qu'à travers les seuls yeux de Ny Axxter. Et comme l'intégralité de son aventure se déroule loin de toutes civilisations, vous ne verrez jamais le monde d'Horizon vertical tel qu'il est, de façon concrète ; si ce n'est ce satané mur sans fin. Tout ce que vous apprendrez sur le cylindre, toute votre compréhension de son univers se fera par le biais d'allusions faîtes par une poignée de personnages croisant parfois la route d'Axxter - autrement dit, au cours de fastidieux dialogues -, ou bien encore au détour des pensées d'Axxter lui même.

Alors en soi, ce point de vue n'est pas déplaisant, simplement dépaysant. Il amplifie la solitude du personnage... et la notre. Il contribue à poser cette ambiance post-apocalyptique à la Mad Max et accroît notre sympathie à l'égard de Ny Axxter, personnage complètement à côté de ses pompes, totalement esseulé et désabusé. L'ennui, c'est que vous ne croiserez personne, à l'exception de quelques personnages aux portraits fort heureusement bien brossés. Qui plus est, vous n'apprendrez rien de plus sur le monde du cylindre que ce que vous avez pu apprendre par l'intermédiaire des rares intervenants. Qui, Quoi, Où, Quand, Comment et Pourquoi ? Vous pouvez vous enfoncer ces questions bien profond car vous n'aurez jamais les réponses, sachez-le. In fine, une fois le livre terminé, vous lancerez un cinglant : tout ça pour ça !

Second point contraignant et pas des moindres : le style. Mais qu'est-ce qui est passé par la tête de K. W. Jeter ? Certains passages, qu'il s'agisse de descriptifs ou de dialogues, laissent vraiment à désirer. Il m'ait souvent arrivé de ne pas comprendre ce que je lisais, perdu entre des phrases à rallonge aux tournures ampoulées et un verbiage qui donne presque mal au crâne. Et rien n'est plus agacant et frustrant que cette impression d'être abêti après de multiples retours en arrière pour relire deux ou trois fois une phrase voire un paragraphe entier qui ne rentre décidément pas dans notre champ de compréhension parce que la syntaxe est soit corrompue par la traduction, soit mal fichue dès son origine. P*t***, je déteste ça. C'est le problème de beaucoup d'auteurs de SF que de pondre des textes alambiqués, littéralement chiants - n'ayons pas peur des mots -, et de les greffer sur une idée géniale. Une spécialité des auteurs américains au passage (cf. le Cycle du Ā, L'Anneau-Monde, Nova, et tant d'autres encore). Bref. le livre se révèle par moment très plaisant, K. W. Jeter ayant une imagination fertile et un savoir-faire solide. A d'autres moments en revanche, c'est tout simplement irritant. Mais bon, comme dans l'ensemble, j'ai beaucoup aimé... Visez un peu ce bras de fer entre subjectivité et objectivité. Cela veut tout dire !

Pour finir, que retenir ?
Eh bien, déjà, le courage qu'il vous aura fallu pour lire cette looongue critique pleine de reproches. D'ailleurs, si le livre est si perfectible, pourquoi en ce cas mettre 4 étoiles ?
Tout simplement, parce qu'il y a un truc ; un truc que je n'arrive pas à m'expliquer et qui donne à ce roman une force, quelque chose de magnétique, qui m'électrise. Peut-être que c'est l'absence d'explication comme dans le film Cube de Vincenzo Natali. L'inutilité d'une chose, sa vacuité, peut nous pousser à une forme d'introspection, allez savoir. Peut-être que c'est cet univers vide, sans frontières, cet espace infini, ce terrain de liberté totale pour bikers révoltés qui, en cette période d'actualité écrasante, anxiogène, donne l'envie de s'évader, de fuir un monde devenu fou, de foutre le camp fissa en traçant sa route à pleine vitesse, la tête dans le vent, un rictus de fauve enfin libre greffé sur la face. La liberté, couper les amarres avec cette société qui part à la dérive. Vivre pour soi. Pas pour des dégénérés. Et c'est d'ailleurs cette réflexion qui pousse Ny Axxter sur les flancs de cette mystérieuse architecture qu'est le cylindre. Rien que le titre francais - au demeurant bien trouvé - Horizon vertical est un contresens absolu ; le titre anglais étant Farewell Horizontal, Adieu horizontale. Tout est dit. Pourquoi des hommes iraient-ils parcourir un mur, harnachés au-dessus du vide, sans cette volonté de rompre avec l'humanité, de renier tout ce qui les entoure pour se sentir à nouveau exister, quitte à se mettre en danger.
Que celui qui n'a jamais souhaité tout plaquer, ne serait-ce qu'un instant, me jette le premier mot.
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