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Critique de lelivredapres


Un portrait de Diderot par des écrivains des XVIIIème et XIXème siècles

L'esprit de Diderot est un recueil composé par Charles Joliet et édité à Paris par Michel Lévy en 1859. Joliet, né en 1832 et mort en 1910, fut un écrivain très prolifique, auteur de romans, de biographies, de recueils de maximes, mais aussi journaliste ayant collaboré à de nombreux journaux. Il est pourtant inconnu du grand public aujourd'hui. Son recueil est réédité pour la première fois, à l'occasion du tricentenaire de la naissance de Diderot, dont je vous ai déjà parlé lors de l'inauguration du Musée Diderot à Langres début octobre.

L'esprit de Diderot est composé de trois parties. La première nous propose une biographie de Diderot écrite par sa fille, Mme de Vandeul, sa chère Marie-Angélique qu'il aimait tant. Dans son «Histoire de Diderot », Mme de Vandeul décrit avec tendresse des moments particuliers de la vie de son père : son arrivée à Paris en tant qu'étudiant, les circonstances qui ont amené à son mariage, son emprisonnement à Vincennes, son voyage en Russie, ses liens avec Rousseau, lequel apparaît d'ailleurs sous un jour peu positif, enfin sa maladie et sa mort.

On retiendra de cette biographie la réponse que fit Diderot à M. Clément, procureur à Paris chez qui il logeait et étudiait le droit, lorsqu'il lui demanda ce qu'il voulait «être», médecin, procureur, avocat … : « Ma foi, rien, mais rien du tout. J'aime l'étude ; je suis fort heureux, fort content, je ne demande pas autre chose » (p9). Une remarque qui explique toute la vie de Diderot qui, passionné par l'étude, était toujours à la recherche de nouveautés pour abreuver sa soif de savoirs, ce qui le mènera tout naturellement à l'Encyclopédie.

Dans la seconde partie du recueil, Joliet a rassemblé des maximes et pensées de celui qui n'est pas, souligne-t-il, un moraliste, mais bien un philosophe. Parmi ces pensées, j'en ai retenu quelques-unes (qui plairont notamment aux femmes qui écrivent) :

Sur la conscience du bien (p68) : «Il y a mille circonstances où il ne reste à l'homme généreux, à l'artiste malheureux, que la conscience d'avoir bien fait ou de bien faire, et l'espoir d'un avenir plus juste que le présent. »

Pourquoi les femmes écrivent bien (p132): « le bon style est dans le coeur ; voilà pourquoi tant de femmes disent et écrivent comme des anges, sans avoir appris ni à dire, ni à écrire, et pourquoi tant de pédants diront et écriront mal toute leur vie, quoi qu'ils n'aient cessé d'étudier sans apprendre ».

Toujours sur les femmes : «Quand elles ont du génie, je leur en crois l'empreinte plus originale qu'en nous »(p135).

Sur l'État et les mécontents (p104) : «Un État chancelle, quand on en ménage les mécontents. Il touche à sa ruine, quand la crainte les élève aux premières dignités».

Enfin, Joliet a enrichi son recueil d'une troisième partie consacrée à différents jugements portés sur Diderot et ses oeuvres, par des écrivains contemporains du philosophe, comme par des auteurs du XIXème. Rousseau a notamment une parole prémonitoire sur la reconnaissance future du génie de Diderot (p163), Grimm présente Diderot comme « la tête la plus naturellement encyclopédique qui ait jamais existé »(p166), Sainte-Beuve dresse un portrait très sympathique de ce philosophe qui aimait la vie et en qui il salue le «créateur de la critique émue, empressée et éloquente » (p180). D'autres soulignent plus particulièrement son éloquence, mais tous reconnaissent son universalité. Enfin, le recueil se termine par un texte de P.J Stahl (pseudonyme de l'éditeur Hetzel) dans lequel il analyse l'athéisme de Diderot.

Avec L'esprit de Diderot, Balland nous offre le portrait d'un philosophe que l'on redécouvre cette année, à la faveur des manifestations célébrant l'anniversaire de sa naissance, et qui apparaît bien plus qu'un auteur du passé : un homme aux préoccupations universelles, aussi bien dans leur étendue que dans le temps. Un modernisme qui rend cette réédition bienvenue !

L'esprit de Diderot, Recueil de maximes et pensées, collectif, Balland, Paris, Août 2013, 208p.



Merci à Babelio et son opération Masse Critique, et aux éditions Balland de m'avoir envoyé L'esprit de Diderot.
http://lelivredaprès.com/un-portrait-de-diderot-par-des-ecrivains-des-xviiieme-et-xixeme-siecles/


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