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Critique de Sofiert


"Je suis la fille de ce monstre, je suis la femme qui trompe, je suis la femme qui a frappé, je suis la femme sèche de l'intérieur, je suis la femme aux entrailles pourries, je suis la fille qui n'a sauvé ni sa mère ni sa soeur."
Comment survivre à une enfance fracassée par la violence d'un père ?

Un homme abject, un alcoolique d'une incommensurable violence, fait régner la terreur dans sa famille. Sa femme et ses deux filles sont quotidiennement insultées, humiliées et battues. Cette violence imprègne le roman dès les premiers mots : «Tout à coup, il a un fusil dans les mains. La minute d'avant, je le jure, on mangeait des pommes de terre. Presque en silence.»
L'onde de choc se répète à de nombreuses reprises, avec des mots puissants et une rage à peine contenue.
Pas d'auto-apitoiement, pas de complaisance ni de misérabilisme mais une colère profonde et une absolue lucidité !
L'auteure décrit les mécanismes de la violence avec crudité, tout comme elle décrit l'indifférence de ceux qui savaient et qui n'ont rien fait.
La violence est aussi de ce côté, surtout lorsque le médecin, cet homme qui aurait pu être son père, un substitut paternel auquel elle rêvait et qui s'avèrera crédible dans la fonction, rejette son appel à l'aide.
Certes Jeanne a des ressources que n'ont ni sa mère, ni sa soeur. Elle sera capable de fuir cette emprise, de sortir de ces montagnes claustrophobes pour se purifier dans l'eau du lac Leman. Elle pourra utiliser son intelligence pour avoir une carrière qui l'éloignera de la misère familiale. Mais elle sera cette transfuge de classe qui garde toujours au fond d'elle un sentiment d'imposture et de culpabilité qui l'empêche de s'épanouir.
Même sa sexualité se construit en opposition aux hommes qui l'ont humiliée. Elle n'en prendra conscience que lorsqu'elle tombera amoureuse de Paul. Si ses relations avec Charlotte et surtout avec Marine lui ont permis de goûter au bonheur et d'apaiser ses angoisses, sa liaison avec Paul déclenche à nouveau une crise d'identité et le sentiment d'une mystification. Elle retrouve alors les
« frusques puantes » de cette enfance douloureuse à laquelle elle ne peut échapper.
La résilience est impossible, l'enfer est un abîme et ce constat fait aussi la force du roman.
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