Bien sûr, je ne dis rien de notre projet à ma mère. San doute 'aurait-elle rabroué d'un : "C'est pas ça quiva vous attraper un poisson ou vous éplucher une banane". n quoi elle aurait eu raison. Mais nous ne cherchions pas à nous remplir le ventre. Nous cherchions quelque chose de beaucoup plus important : une autre vie.
Nous avons été dépouillés de nos biens et même, pour la plupart, de nos maisons, dit-il. Mais ces pertes, si sévères qu'elles puissent paraître, nous rappellent aussi ce que personne ne peut nous ravir, c'est-à-dire notre esprit et notre imagination.
M. Watts nous offrait en partage une portion du monde, où je pouvais me réfugier aussi souvent que j'en avais envie.
On ne l'avait jamais fait la lecture en anglais auparavant. Ni à moi, ni aux autres. Nous n'avions pas de livres chez nous, les seuls qui nous étaient passés entre les mains avant le blocus venaient de Port Moresby et étaient écrits en pidgin. Quand M. Watts se mit à lire, nous observâmes un profond silence. Le monde accueillait des sonorités nouvelles. Il lisait lentement, nous donnant à entendre la forme de chaque mot.
Nous avions été élevés avec la conviction que le blanc était la couleur de toutes les choses importantes : la glace, l'aspriine, les rubans, la lune, les étoiles.
Grâce aux rêves le monde a été réinventé plus souvent qu'il n'y a d'étoiles dans le ciel.
... et au-delà, un monde secret où elle se connaissait comme personne. Un monde où il était impossible de la rejoindre.