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Critique de gromit33


Ce texte n'est pas vraiment un roman mais plutôt un récit. Et c'est un récit passionnant car il est à la fois une histoire-recherche personnelle mais aussi l'histoire du Québec et des Etats Unis.
J'ai beaucoup apprécié ce texte car j'ai appris beaucoup de choses sur l'histoire des communautés québécoises, que ce soit l'histoire des autochtones, de l'esclavage...
Mère à la peau cuivrée, père inconnu : longtemps, Bianca a tout ignoré de ses racines. Quand elle se décide à faire parler les morts et les archives, elle rejoint le début du XXe siècle, l'époque où les forêts du Bas-Saint-Laurent abritaient la nation autochtone de son arrière-grand-mère, Adriana. Une orpheline mi'kmaq adoptée par une famille blanche, éprise d'un homme noir en fuite. En tissant ce flamboyant destin avec des épisodes fondateurs de l'esclavage, sa quête dénonce la domination sans fin d'une couleur sur les autres.
Au fils des pages, nous allons remonter au 18e, 19e et 20e siècle et la vie de cette arrière grand mère, d'origine autochtone et qui va vivre une histoire d'amour avec un esclave noir affranchi. Des personnages romanesques jalonnent ce texte mais aussi des personnages historiques. Nous croisons au fils des pages, des personnages réels comme Mathieu Leveillé qui, de 1733 à 1743, a été le premier bourreau de Québec. Un bourreau un peu spécial, qu'on surnommait également Malgein. Il s'agissait d'un esclave noir que l'intendant Hocquart avait fait venir de Martinique pour être «exécuteur des hautes oeuvres», comme on le disait alors. Il y a aussi le portrait de Viola Desmond qui reste une icône du mouvement en faveur des droits et libertés au Canada. Femme d'affaires accomplie de la Nouvelle-Écosse, elle a défié l'autorité, refusant de quitter une section réservée aux Blancs d'un cinéma en 1946, après quoi elle a été incarcérée, reconnue coupable et condamnée à une amende. Son procès constitue l'une des premières contestations judiciaires soulevées par une femme noire au Canada pour cause de ségrégation raciale. Elle est maintenant sur les billets de 10 $ canadien.
Ce titre est aussi très poétique et interpelle. L'auteure nous raconte la société québécoise et les origines des différentes communautés mais aussi les liens entre ces communautés. La narratrice vient à la fois de parents autochtones, avec ce beau portrait de cette arrière grand mère et de parents issus des esclaves noirs affranchis. j'ai à nouveau découvert dans ce texte, la situation des esclaves à l'abolition (certains ont dû fuir et passer la frontière et s'installer au Canada, d'autres ont décidé de repartir vers l'Afrique (écho de ma lecture récente du texte Liberia de Christophe Naigeon).
Mais ce texte est très romanesque aussi avec de beaux portraits, de belles pages sur la nature, sur les lieux de mémoire (que ce soit des maisons, des bibliothèques, des lieux d'archive). Un texte foisonnant et qui nous ouvre d'autres univers.
"L'Amérique n'est blanche qu'en hiver", si beau titre poétique est la version française de "Couleur chair", paru au Québec en août 2022, et dont le titre fait référence à la peau de la narratrice, qui va découvrir peu à peu qu'elle n'est pas aussi blanche que ce qu'elle croit.
Quel destin de découvrir que son arrière grand-mère était une autochtone, tombée amoureuse d'un noir, esclave affranchi qui avait fui les Etats Unis. Poétique et onirique, le livre de Bianca Joubert est un voyage dans le temps politique et poétique, qui saute d'une époque à l'autre et d'un lieu à l'autre pour mieux montrer comment l'oppresseur blanc tente le plus souvent de piétiner les identités plus complexes que la sienne.
Un livre dont je vous conseille la lecture.
#LAmériquenestblanchequenhiver #NetGalleyFrance
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