AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de colimasson


Les théories scientifiques périment en moins d'une semaine. On peut toutefois lire des articles datés de plus de 25 ans lorsqu'ils sont bien écrits et qu'ils ne s'arrêtent pas à la seule description systémique.


Malgré tout, il faut bien se farcir les passages techniques, ne serait-ce que pour réconforter le larbin qui veut rentabiliser ses études de biologie. L'hypothèse innovante ici proposée est la suivante : le rêve serait un troisième état du cerveau, différent de celui de l'éveil et de celui du sommeil. Tout le monde connaît l'éveil, il paraît, je ne vais donc pas vous décrire ce dont il s'agit, quoi que ça ne nous ferait pas de mal. Passons. Pour le sommeil, Docteur Jouvet nous dit qu'il apparaît sous l'influence de la sérotonine libérée au cours de l'éveil, lorsque la région préoptique est activée, celle-ci mettant en jeu une cascade d'inhibitions intéressant les systèmes aminergiques. On constate alors une diminution de l'activité du système bulbaire, une vasodilatation provoquant la perte de chaleur et une diminution du métabolisme. le sommeil paradoxal apparaît quand les systèmes aminergiques sont silencieux. Génial, on sait comment ça se passe, mais on ne sait toujours pas pourquoi ça se passe. Bordel dieu, qu'est-ce donc que le rêve ? Est-il lié au sommeil paradoxal ? A l'activité ponto-géniculo-occipitale responsable des mouvements oculaires rapides ? Tout ça était tellement foutraque que les chercheurs, rendus fous, en vinrent à émettre l'hypothèse que « c'est l'ensemble des conditions suffisantes à l'apparition du rêve qui est la véritable cause du rêve. Ainsi, même le concept de causalité est devenu flou ». Moi, j'aime bien cette idée-là. En gros, le sommeil témoignerait d'une disponibilité suffisante de l'organisme pour accueillir l'état du rêve. C'est pour ça qu'on ne rêve pas en état d'éveil (normalement). le rêve a besoin de calme, de santé, de protection. Mais pour faire quoi ? Qu'est-ce qu'il nous veut ce putain de rêve ? Revient la sempiternelle question : pourquoi rêve-t-on, bande de tarlouzes ?


Première piste : « Plus un mammifère […] est immature, plus quelque chose qui ressemble au sommeil paradoxal (ce que l'on appelle le sommeil sismique) est important. Il correspond à la fin de la programmation génétique du cerveau, à la fin de la neurogenèse […]. »


Confirmation de piste : « le sommeil paradoxal prend peu à peu le relais du sommeil sismique au fur et à mesure de la disparition de la neurogenèse au cours du développement post-natal des mammifères. […]. »


Hypothèse : « le sommeil paradoxal pourrait-il effectuer une programmation génétique itérative chez les espèces dont la neurogenèse cesse à la fin de l'ontogenèse ? »


Les poïkilotermes (animaux à sang-froid), contrairement aux homéotermes, connaissent une neurogenèse qui dure aussi longtemps qu'ils vivent. Pour nous, mammifères, la période de grâce s'interrompt peu après la naissance. Pourtant, nous continuons à évoluer et à nous différencier par suite de nos apprentissages et de nos expériences. Quel système le permet, si ce n'est pas la neurogenèse ? le rêve pourrait venir combler cette lacune de notre système explicatif en admettant qu'il effectue une programmation itérative qui permet d'entériner l'individuation de chacun.


C'est ce qu'on s'efforcera de nous démontrer dans ce livre, modulo le grand nombre d'années de gloire passées depuis. L'auteur conclut en nous disant que malgré tout, on n'en sait toujours pas plus sur la fonction du rêve, restons modestes. Certains auront peut-être le courage de s'instruire des hypothèses contemporaines pour un module comparatif. Mais sinon, le rêve comme programme itératif de développement est une idée que je trouve plutôt jolie.
Commenter  J’apprécie          152



Ont apprécié cette critique (14)voir plus




{* *}