AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Pecosa


Pecosa
26 septembre 2013
Déçue par le manuscrit de Grenade de Marianne Leconte, c'est avec une certaine réserve que j'ai ouvert Les lions d'Al-Rassan, cédant enfin aux sirènes de Boudicca et aux encouragements répétés d'Instinct Polaire. Peu habituée à la fantasy, j'ai pourtant bien pris note dans les remerciements de Gavriel Kay, que la frontière est étroite "entre l'histoire réelle et l'histoire imagée". Mais voilà, dès les premières pages, impossible pour moi de faire abstraction de al Andalus et de ne pas chercher derrière les personnages, les phrases, la toponymie, des noms et des faits familiers. Gavriel Kay évoque-t-il Rodrigo Diaz de Vivar, Samuel Ben Nigrello, Hasdai Ibn Shaprut, Ibn Ammar ou Ibn Bassam? Ces royaumes chrétiens déchirés par des luttes intestines sont-il La Catalogne (Jalogne,), La Galice (Ruende?), La Castille (Valledo?)? Les ethnies asharites qui s'affrontent sont-elles de lointaines réminiscences des Almohades et des Almoravides? Voilà que des siècles d'histoire sont passés à la moulinette et retranscrits sur une ou deux générations. Heureusement, très rapidement un charme puissant opère, balayant tout sur son passage, me laissant le nez plongé dans le roman, étourdie par l'imagination du romancier, le charme des personnages, la subtilité des intrigues et la belle histoire d'amour ("Je crois(...) que je vous reconnaîtrais dans une pièce totalement noire. Je crois que je vous reconnaîtrais n'importe où près de moi dans le monde.") (soupir!)... Point de merveilleux ici ou de surnaturel, dans cette transposition d'une période charnière de l'histoire de l'Espagne jusqu'à la chute du royaume de Grenade, elle est parfaitement rendue, ingénieusement transportée sous la cosmogonie et les mythes fondateurs de Al-Rassan. Guy Gavriel Kay dit admirablement la complexité des alliances, la beauté et la cruauté de la civilisation asharite, où se mêlent la guerre, le raffinement et la sensualité, une civilisation dont les personnages pressentent la disparition imminente ("Bien aimée Al-Rassam, devrai-je vivre pour écrire ainsi ton éloge funèbre?"). Adieu donc à tous les romans lus et aimés auparavant, ceux de Corral Lafuente, Galvan ou Baer, Les lions d'Al-Rassan m'ont conquise. Les trois héros qui incarnent les trois religions sont charismatiques en diable, les personnages secondaires ont une vraie consistance et les femmes ont la part belle.L'épilogue vous tirerait des larmes ("Avez-vous des nouvelles des gens d'Andalousie?" écrivit Ibn Abbad de Ronda, cité par Guy Gavriel Kay dans les remerciements...) Comme Boabdil de Grenade jetant un ultime regard à la cité perdue, j'ai moi aussi poussé un long soupir en tournant la dernière page du livre et remercie chaleureusement Instinct Polaire pour ce beau voyage qui me fait rêver depuis des jardins de l'Alhambra.
Commenter  J’apprécie          6228



Ont apprécié cette critique (52)voir plus




{* *}